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ANNALES DE L’EMPIRE.

Le roi d’Espagne Philippe II meurt à soixante et douze ans, après quarante-deux de règne. Il avait troublé une partie de l’Europe sans que jamais ni son oncle Ferdinand, ni son cousin Maximilien, ni son neveu Rodolphe, eussent servi à ses desseins, ni qu’il eût contribué à leur grandeur. Il avait donné avant sa mort les Pays-Bas à l’infante Isabelle, sa fille ; ce fut sa dot en épousant le cardinal archiduc Albert. C’était priver son fils Philippe III et la couronne d’Espagne d’une belle province ; mais les troubles qui la déchiraient la rendaient onéreuse à l’Espagne, et ce pays devait revenir à la couronne espagnole en cas que l’archiduc Albert n’eût point d’enfants mâles, ce qui arriva en effet.

Il s’agissait de chasser les Turcs de la haute Hongrie. La diète accorde vingt mois romains[1] pendant trois ans pour cette guerre.

Le même Sigismond Battori, qui avait quitté les Turcs et fait hommage de la Transylvanie à l’empereur, se repent de ces deux démarches. On lui avait donné en échange de sa souveraineté et de la Valachie les mêmes terres qu’à la reine, mère d’Étienne-Jean-Sigismond[2], c’est-à-dire Oppeln et Ratibor en Silésie. Il ne fut pas plus content de son marché que cette reine. Il quitte la Silésie ; il rentre dans ses États ; mais, toujours inconstant et faible, il les cède à un cardinal, son cousin. Ce cardinal, André Battori, se met aussitôt sous la protection des Turcs, reçoit du sultan une veste, comme un gage de la faveur qu’il demande. Semblable à Martinusius, il se met comme lui à la tête d’une armée ; mais il est tué en combattant contre les Impériaux.

1599. Par la mort du cardinal Battori, et par la fuite de Sigismond, la Transylvanie reste à l’empereur ; mais la Hongrie ne cesse d’être dévastée par les Turcs. Ceux qui s’étonnent aujourd’hui que ce pays si fertile soit si dépeuplé en trouveront aisément la raison dans le nombre d’esclaves des deux sexes que les Turcs ont si souvent enlevés.

L’empereur, dans cette année, se résolut à affranchir enfin le Virtemberg de l’inféodation de l’Autriche. Le Virtemberg ne releva plus que de l’empire ; mais il doit toujours revenir à la maison d’Autriche, au défaut d’héritier.

1600. Les Turcs s’avancent jusqu’à Canise, sur la Drave, vers

  1. Voyez la note, pape 537.
  2. Le même que celui qui est cite plus haut, au commencement de 1570, comme prince de Transylvanie ; mort en 1571. Sa mère, la reine Isabelle, mourut en 1559, dix ans après le cardinal Martinusius. (Cl.)