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FERDINAND II.

Mantoue ; elle s’était déjà mêlée des affaires de la Valteline : elle avait empêché la branche d’Autriche espagnole de s’emparer de ce pays, qui eût ouvert une communication du Milanais au Tyrol, et qui eût rejoint les deux branches d’Autriche par les Alpes, comme elles l’étaient vers le Rhin par les Pays-Bas. Le cardinal de Richelieu prend donc, dans cet esprit, le parti du duc de Mantoue.

Les Vénitiens, plus voisins et plus exposés, envoient dans le Mantouan une armée de quinze mille hommes. L’empereur déclare rebelles tous les vasseaux de l’empire, en Italie, qui prendront parti pour le duc. Le pape Urbain VIII est obligé de favoriser ces décrets.

Le pontificat alors était dépendant de la maison d’Autriche ; et Ferdinand, qui se voyait à la tête de cette maison par sa dignité impériale, était regardé comme le plus puissant prince de l’Europe.

Les troupes allemandes, avec quelques régiments espagnols, prennent Mantoue d’assaut, et la ville est livrée au pillage.

Ferdinand, heureux partout, croit enfin que le temps est venu de rendre la puissance impériale despotique, et la religion catholique entièrement dominante. Par un édit de son conseil, il ordonne que les protestants restituent tous les biens ecclésiastiques dont ils s’étaient emparés depuis le traité de Passau, signé par Charles-Quint. C’était porter le plus grand coup au parti protestant ; il fallait rendre les archevêchés de Magdebourg et de Brême, les évêchés de Brandebourg, de Lebus, de Camin, d’Havelberg, de Lubeck, de Misnie, de Naumbourg, de Mersebourg, de Schverin, de Minden, de Verden, de Halberstadt, une foule de bénéfices. Il n’y avait point de prince, soit luthérien, soit calviniste, qui n’eût des biens de l’Église.

Alors les protestants n’ont plus de mesures à garder. L’électeur de Saxe, que l’espérance d’avoir Clèves et Juliers avait longtemps retenu, éclate enfin ; cette espérance s’affaiblissait d’autant plus que l’électeur de Brandebourg et le duc de Neubourg s’étaient accordés : le premier jouissait de Clèves paisiblement, et le second de Juliers, sans que l’empereur les inquiétât. Ainsi le duc de Saxe voyait ces provinces lui échapper, et allait perdre Magdebourg et le revenu de plusieurs évêchés.

L’empereur alors avait près de cent cinquante mille hommes en armes ; la ligue catholique en avait environ trente mille. Les deux maisons d’Autriche étaient intimement unies. Le pape et toutes les églises catholiques encourageaient l’empereur dans son