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ANNALES DE L’EMPIRE.

qu’on payera sur ces mêmes bénéfices à l’électeur de Brandebourg, calviniste. Les intérêts de la maison palatine, qui avaient allumé cette longue guerre, lurent le moindre objet de ce traité. L’électeur de Bavière devait seulement donner une subsistance à la veuve de celui qui avait été roi de Bohême, et au palatin son fils, quand il serait soumis à l’autorité impériale.

L’empereur s’engageait d’ailleurs à rendre tout ce qu’il avait pris sur les confédérés de la ligue protestante qui accéderaient à ce traité ; et ceux-ci devaient rendre tout ce qu’ils avaient pris sur la maison d’Autriche : ce qui était peu de chose, puisque les terres de la maison impériale, excepté l’Autriche antérieure, n’avaient jamais été exposées dans cette guerre.

Une partie de la maison de Brunsvick, le duc de Mecklenbourg, la maison d’Anhalt, la branche de Saxe établie à Gotha, et le propre frère du duc Bernard de Saxe-Veimar, signent le traité, ainsi que plusieurs villes impériales ; les autres négocient encore, et attendent les plus grands avantages.

Le fardeau de la guerre, que les Français avaient laissé porter tout entier à Gustave-Adolphe, retomba donc sur eux en 1635 ; et cette guerre, qui s’était faite des bords de la mer Baltique jusqu’au fond de la Souabe, fut portée en Alsace, en Lorraine, en Franche-Comté, sur les frontières de la France. Louis XIII, qui n’avait payé que douze cent mille francs de subsides à Gustave-Adolphe, donnait quatre millions à Bernard de Veimar pour entretenir les troupes veimariennes, et encore le ministère français cède-t-il à ce duc toutes ses prétentions sur l’Alsace, et on lui promet qu’à la paix on le fera déclarer landgrave de cette province.

Il faut avouer que si ce n’était pas le cardinal de Richelieu qui eût fait ce traité, on le trouverait bien étrange. Comment donnait-il à un jeune prince allemand, qui pouvait avoir des enfants, cette province d’Alsace qui était si fort à la bienséance de la France, et dont elle possédait déjà quelques villes ? Il est bien probable que le cardinal de Richelieu n’avait point compté d’abord garder l’Alsace. Il n’espérait pas non plus annexer à la France la Lorraine, sur laquelle on n’avait aucun droit, et qu’il fallait bien rendre à la paix. La conquête de la Franche-Comté paraissait plus naturelle ; mais on ne fit de ce côté que de faibles efforts. L’espérance de partager les Pays-Bas avec les Hollandais était le principal objet du cardinal de Richelieu ; et c’était là ce qu’il avait tellement à cœur qu’il avait résolu, si sa santé et les affaires le lui eussent permis, d’y aller commander en personne.