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SUITE DES ANECDOTES.

« Les rois sont souvent obligés à faire des choses contre leur inclination, et qui blessent leur bon naturel. Ils doivent aimer à faire plaisir, et il faut qu’ils châtient souvent, et perdent des gens à qui naturellement ils veulent du bien. L’intérêt de l’État doit marcher le premier. On doit forcer son inclination, et ne pas se mettre en état de se reprocher, dans quelque chose d’importance, qu’on pouvait faire mieux ; mais quelques intérêts particuliers m’en ont empêché, et ont détourné les vues que je devais avoir pour la grandeur, le bien, et la puissance de l’État. Souvent il y a des endroits qui font peine ; il y en a de délicats qu’il est difficile de démêler ; on a des idées confuses. Tant que cela est, on peut demeurer sans se déterminer ; mais, dès que l’on se fixe l’esprit à quelque chose, et qu’on croit voir le meilleur parti, il le faut prendre. C’est ce qui m’a fait réussir souvent dans ce que j’ai entrepris. Les fautes que j’ai faites, et qui m’ont donné des peines infinies, ont été par complaisance, et pour me laisser aller trop nonchalamment aux avis des autres. Rien n’est si dangereux que la faiblesse, de quelque nature qu’elle soit. Pour commander aux autres, il faut s’élever au-dessus d’eux ; et après avoir entendu ce qui vient de tous les endroits, on se doit déterminer par le jugement qu’on doit faire sans préoccupation, et pensant toujours à ne rien ordonner ni exécuter qui soit indigne de soi, du caractère qu’on porte, ni de la grandeur de l’État. Les princes qui ont de bonnes intentions et quelque connaissance de leurs affaires, soit par expérience, soit par étude et une grande application à se rendre capables, trouvent tant de différentes choses par lesquelles ils se peuvent faire connaître qu’ils doivent avoir un soin par-

    pliroit la mieux je lenuoyé querir mon choix fut aprouvé de tout le monde ce qui narrive pas toujours je le mis en possession de la charge à son retour je ne le connoissois que de reputation et par les commissions dont je l’auois chargé quil auoit bien exécutée mais lemploy que je luy ay donné sest trouué trop grand et trop estendu pour luy jay soufer plusieurs années de sa foiblesse de son opiniastreté et de son inapplication il men a cousté des choses considérables je nay pas profité de tous les auantages que je pouuois avoir et tout cela par complaisance et bonté enfin il a falu que je luy ordonnase de se retirer parce que tout ce qui passoit par luy perdoit de la grandeur et de la force quon doit auoir en exécutant les ordres dun roy de franco qui naist pas malheureux si jauois pris le party de lesloigner plustost jaurois esuité les inconueniens qui me sont arriués et je ne me reprocherois pas que ma complaisance pour luy a pu nuire a lestat jay fait ce destail pour faire uoir une exemple de ce que jay dit cydeuant. »

    Ces fragments prouvent que Louis XIV ne savait pas l’orthographe. Voltaire, son éditeur, en la mettant dans ce qu’il imprimait, a fait pour Louis XIV ce que les éditeurs de Voltaire ont fait depuis quelquefois pour lui-même. (B.)

    — On a publié les Mémoires complets dans les Œuvres de Louis XIV en 1806, et de nos jours en 1859.