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GOUVERNEMENT INTÉRIEUR.

CHAPITRE XXIX.

GOUVERNEMENT INTÉRIEUR. JUSTICE. COMMERCE. POLICE. LOIS. DISCIPLINE MILITAIRE. MARINE, ETC.


On doit cette justice aux hommes publics qui ont fait du bien à leur siècle, de regarder le point dont ils sont partis, pour mieux voir les changements qu’ils ont faits dans leur patrie. La postérité leur doit une éternelle reconnaissance des exemples qu’ils ont donnés, lors même qu’ils sont surpassés. Cette juste gloire est leur unique récompense. Il est certain que l’amour de cette gloire anima Louis XIV, lorsque, commençant à gouverner par lui-même, il voulut réformer son royaume, embellir sa cour, et perfectionner les arts.

Non-seulement il s’imposa la loi de travailler régulièrement avec chacun de ses ministres, mais tout homme connu pouvait obtenir de lui une audience particulière, et tout citoyen avait la liberté de lui présenter des requêtes et des projets. Les placets étaient reçus d’abord par un maître des requêtes qui les rendait apostillés ; ils furent dans la suite renvoyés aux bureaux des ministres. Les projets étaient examinés dans le conseil quand ils méritaient de l’être, et leurs auteurs furent admis plus d’une fois à discuter leurs propositions avec les ministres en présence du roi. Ainsi on vit entre le trône et la nation une correspondance qui subsista malgré le pouvoir absolu.

Louis XIV se forma et s’accoutuma lui-même au travail ; et ce travail était d’autant plus pénible qu’il était nouveau pour lui, et que la séduction des plaisirs pouvait aisément le distraire. Il écrivit les premières dépêches à ses ambassadeurs. Les lettres les plus importantes furent souvent depuis minutées de sa main, et il n’y en eut aucune écrite en son nom qu’il ne se fit lire[1].

À peine Colbert, après la chute de Fouquet, eut-il rétabli l’ordre dans les finances que le roi remit aux peuples tout ce qui était dû d’impôts depuis 1647 jusqu’en 1656, et surtout trois millions de tailles[2]. On abolit pour cinq cent mille écus par an de

  1. Voyez Correspondance administrative sous le règne de Louis XIV, publiée par M. Depping. Paris, 1850 et suiv., quatre volumes in-4o.
  2. Ces arrérages de tailles n’étaient dus que par des gens qu’il était impossible