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LE PARLEMENT APPELÉ COUR DES PAIRS.


barons relevants autrefois de la couronne ; ils sont non-seulement les juges de la nation, mais les législateurs, conjointement avec le roi et les communes[1].



CHAPITRE IX.


POURQUOI LE PARLEMENT DE PARIS FUT APPELÉ LA COUR DES PAIRS.


La chambre du parlement, à laquelle la chambre des enquêtes et celle des requêtes présentaient les procès par écrit, étant dans son institution composée de barons, il était bien naturel que les grands pairs, les ducs et comtes y pussent entrer et eussent voix délibérative quand ils se trouvaient à Paris. Ils étaient de plein droit conseillers-nés du roi ; ils étaient à la tête du grand conseil ; il fallait bien qu’ils fussent aussi conseillers-nés d’une cour composée de noblesse. Ils pouvaient donc entrer dans la chambre, depuis appelée grand’chambre, parce que tous les juges y étaient originairement des barons. Ils avaient en effet ce droit, quoiqu’ils ne l’exerçassent pas, comme ils ont celui de siéger dans tous les parlements de province ; mais jamais ils n’ont été aux chambres des enquêtes : la plupart des officiers de ces chambres ayant été originairement des jurisconsultes sans dignité et sans noblesse.

Si les pairs purent siéger à la chambre du parlement, lorsque les évêques des provinces et les abbés en furent exclus, ce fut parce qu’on ne pouvait ôter à un duc de Bourgogne, à un duc de Guienne, à un comte d’Artois, une prérogative dont on dépouillait aisément un évêque sans puissance ; et si on leur ôta ce privilége, ce fut parce que, dans les démêlés fréquents avec les papes, il était à craindre que les évêques ne prissent quelquefois le parti de Rome contre les intérêts de l’État. Les six pairs ecclésiastiques, avec l’évêque de Paris et l’abbé de Cluny, conservèrent seulement le droit d’avoir séance au parlement : et il faut remarquer

  1. Voltaire argumente ici pour prouver que le parlement n’a pas le droit de juger les ducs et pairs. Or le parlement venait de faire le procès au duc et pair Fitz-James, et s’apprêtait à poursuivre le duc et pair d’Aiguillon. (G. A.)