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DU SUPPLICE D’ANNE DUBOURG.


saient le respect public pour le trône, les impôts aliénaient l’affection, et tous les parlements étaient mécontents.

Le roi, pour avoir plus aisément de l’argent, convoqua une grande assemblée dans la chambre du parlement de Paris, en 1558. Quelques-uns de nos historiens lui ont donné le nom d’états généraux, mais c’était une assemblée de notables, composée des grands qui se trouvèrent à Paris, et de quelques députés de province. Pour assembler de vrais états généraux, il eût fallu plus de temps, plus d’appareil, et la grand’chambre aurait été trop petite pour les contenir.

Les trésoriers généraux des finances y eurent une séance particulière ; ni eux, ni le parlement, n’y furent confondus avec le tiers état. Il n’était pas possible que le parlement, cour des pairs, n’eût pas une place distinguée dans le lieu même de sa résidence.

Le roi y parla lui-même ; la convocation ne dura que huit jours ; le seul objet était d’obtenir trois millions d’écus d’or : le clergé en paya un tiers, et le peuple les deux autres tiers ; jusque-là tout fut paisible.



CHAPITRE XXI.


DU SUPPLICE d’ANNE DUBOURG.


Le duc François de Guise et le cardinal de Lorraine son frère commençaient à gouverner l’État sous Henri II. François de Guise avait été déclaré lieutenant général de l’État ; et en cette qualité il précédait le connétable, et lui écrivait en supérieur. Le cardinal de Lorraine, qui avait la première place dans le conseil, voulut, pour se rendre encore plus nécessaire, établir en France l’Inquisition, et il y parvint même enfin à quelques égards.

On n’institua pas à la vérité en France ce tribunal, qui offense à la fois la loi naturelle, toutes celles de l’État, la liberté des hommes, et la religion, qu’il déshonore en la soutenant ; mais on donna le titre d’inquisiteurs à quelques ecclésiastiques qu’on admit pour juges dans les procès extraordinaires qu’on faisait à ceux de la religion prétendue réformée ; tel fut ce fameux Mouchy qu’on appelait Démocharès, recteur de l’université. C’était proprement un délateur et un espion du cardinal de Lorraine ; c’est