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DROIT CANONIQUE.


Les mêmes raisons de police et d’ordre n’exigeraient-elles pas qu’il y eût des registres exacts, entre les mains du magistrat, de tous ceux qui font des vœux pour entrer dans les cloîtres, dans les pays où les cloîtres sont admis ?

Dans le sacrement de pénitence, le ministre qui refuse ou accorde l’absolution n’est comptable de ses jugements qu’à Dieu ; de même aussi le pénitent n’est comptable qu’à Dieu s’il communie ou non, et s’il communie bien ou mal.

Aucun pasteur pécheur ne peut avoir le droit de refuser publiquement, et de son autorité privée, l’eucharistie à un autre pécheur. Jésus-Christ, impeccable, ne refusa pas la communion à Judas.

L’extrême-onction et le viatique, demandés par les malades, sont soumis aux mêmes règles. Le seul droit du ministre est de faire des exhortations au malade, et le devoir du magistrat est d’avoir soin que le pasteur n’abuse pas de ces circonstances pour persécuter les malades.

Autrefois, c’était l’Église en corps qui appelait ses pasteurs et leur conférait le droit d’instruire et de gouverner le troupeau : ce sont aujourd’hui des ecclésiastiques qui en consacrent d’autres ; mais la police publique doit y veiller.

C’est sans doute un grand abus, introduit depuis longtemps, que de conférer les ordres sans fonction ; c’est enlever des membres à l’État sans en donner à l’Église. Le magistrat est en droit de réformer cet abus.

Le mariage, dans l’ordre civil, est une union légitime de l’homme et de la femme pour avoir des enfants, pour les élever, et pour leur assurer les droits des propriétés sous l’autorité de la loi. Afin de constater cette union, elle est accompagnée d’une cérémonie religieuse, regardée par les uns comme un sacrement, par les autres comme une pratique de culte public : vraie logomachie qui ne change rien à la chose. Il faut donc distinguer deux parties dans le mariage : le contrat civil ou l’engagement naturel, et le sacrement ou la cérémonie sacrée. Le mariage peut donc subsister avec tous ses effets naturels et civils, indépendamment de la cérémonie religieuse. Les cérémonies même de l’Église ne sont devenues nécessaires, dans l’ordre civil, que parce que le magistrat les a adoptées. Il s’est même écoulé un long temps sans que les ministres de la religion aient eu aucune part à la célébration des mariages. Du temps de Justinien, le consentement des parties en présence de témoins, sans aucune cérémonie de l’Église, légitimait encore le mariage parmi les chrétiens. C’est