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DROIT CANONIQUE.

cet empereur qui fit, vers le milieu du vie siècle, les premières lois pour que les prêtres intervinssent comme simples témoins, sans ordonner encore de bénédiction nuptiale. L’empereur Léon, qui mourut sur le trône en 886, semble être le premier qui ait mis la cérémonie religieuse au rang des conditions nécessaires. La loi même qu’il fit atteste que c’était un nouvel établissement.

De l’idée juste que nous nous formons ainsi du mariage, il résulte d’abord que le bon ordre et la piété même rendent aujourd’hui nécessaires les formalités religieuses, adoptées dans toutes les communions chrétiennes ; mais l’essence du mariage ne peut en être dénaturée, et cet engagement, qui est le principal dans la société, est et doit demeurer toujours soumis, dans l’ordre politique, à l’autorité du magistrat.

Il suit de là encore que deux époux élevés dans le culte même des infidèles et des hérétiques ne sont point obligés de se remarier, s’ils l’ont été selon la loi de leur patrie : c’est au magistrat, dans tous les cas, d’examiner la chose.

Le prêtre est aujourd’hui le magistrat que la loi a désigné librement en certains pays pour recevoir la foi de mariage. Il est très-évident que la loi peut modifier ou changer, comme il lui plaît, l’étendue de cette autorité ecclésiastique.

Les testaments et les enterrements sont incontestablement du ressort de la loi civile et de celui de la police. Jamais les magistrats n’auraient dû souffrir que le clergé usurpât l’autorité de la loi à aucun de ces égards. On peut voir encore, dans le Siècle de Louis XIV et dans celui de Louis XV, des exemples frappants des entreprises de certains ecclésiastiques fanatiques sur la police des enterrements[1]. On a vu des refus de sacrements, d’inhumation, sous prétexte d’hérésie : barbarie dont les païens mêmes auraient eu horreur.


SECTION VII[2].


Juridiction des ecclésiastiques.


Le souverain peut sans doute abandonner à un corps ecclésiastique ou à un seul prêtre une juridiction sur certains objets et sur certaines personnes, avec une compétence convenable à l’autorité confiée. Je n’examine point s’il a été prudent de remettre

  1. Voyez, dans le Siècle de Louis XIV, le chapitre xxxvi ; dans le Précis du Siècle de Louis XV, le chapitre xxxvi ; dans l’Histoire du Parlement, le chapitre lxiv ; et ci-après l’article Enterrement.
  2. Voyez la note de la page 429.