Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu/212

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

D'un peuple curieux trompeur amusement,
Qu'on étale avec pompe, et que le coeur dément.
Mais parlez ; Rome enfin vient de vous rendre un maître :
Hérode est souverain ; est-il digne de l'être ?
Vient-il dans un esprit de fureur ou de paix ?
Craint-on des cruautés ? attend-on des bienfaits ?

IDAMAS.

Veuille le juste ciel, formidable au parjure,
Écarter loin de lui l'erreur et l'imposture !
Salome et Mazaël s'empressent d'écarter
Quiconque a le coeur juste et ne sait point flatter.
Ils révèlent, dit-on, des secrets redoutables :
Hérode en a pâli ; des cris épouvantables
Sont sortis de sa bouche, et ses yeux en fureur
À tout ce qui l'entoure inspirent la terreur.
Vous le savez assez, leur cabale attentive
Tint toujours près de lui la vérité captive.
Ainsi ce conquérant qui fit trembler les rois,
Ce roi dont Rome même admira les exploits,
De qui la renommée alarme encor l'Asie,
Dans sa propre maison voit sa gloire avilie :
Haï de son épouse, abusé par sa soeur,
Déchiré de soupçons, accablé de douleur,
J'ignore en ce moment le dessein qui l'entraîne.
On le plaint, on murmure, on craint tout pour la reine ;
On ne peut pénétrer ses secrets sentiments,
Et de son coeur troublé les soudains mouvements ;
Il observe avec nous un silence farouche ;
Le nom de Mariamne échappe de sa bouche ;
Il menace, il soupire, il donne en frémissant
Quelques ordres secrets qu'il révoque à l'instant.
D'un sang qu'il détestait Mariamne est formée ;
Il voulut la punir de l'avoir trop aimée :
Je tremble encor pour elle.

SOHÊME.

Il suffit, Idamas.
La reine est en danger : Ammon, suivez mes pas ;
Venez, c'est à moi seul de sauver l'innocence.

IDAMAS.

Seigneur, ainsi du roi vous fuirez la présence ?
Vous de qui la vertu, le rang, l'autorité,
Imposeraient silence à la perversité ?