Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu/219

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SALOME.

Ah ! c'est trop l'épargner, vous tromper, et me taire.
Je m'expose à me perdre et cherche à vous servir :
Et je vais vous parler, dussiez-vous m'en punir.
Époux infortuné qu'un vil amour surmonte !
Connaissez Mariamne, et voyez votre honte :
C'est peu des fiers dédains dont son coeur est armé,
C'est peu de vous haïr ; un autre en est aimé.

HÉRODE.

Un autre en est aimé ! Pouvez-vous bien, barbare,
Soupçonner devant moi la vertu la plus rare ?
Ma soeur, c'est donc ainsi que vous m'assassinez !
Laissez-vous pour adieux ces traits empoisonnés,
Ces flambeaux de discorde, et la honte et la rage,
Qui de mon coeur jaloux sont l'horrible partage ?
Mariamne... Mais non, je ne veux rien savoir :
Vos conseils sur mon âme ont eu trop de pouvoir.
Je vous ai longtemps crue, et les cieux m'en punissent.
Mon sort était d'aimer des coeurs qui me haïssent.
Oui, c'est moi seul ici que vous persécutez.

SALOME.

Eh bien donc ! loin de vous...

HÉRODE.

Non, madame, arrêtez.
Un autre en est aimé ! montrez-moi donc, cruelle,
Le sang que doit verser ma vengeance nouvelle ;
Poursuivez votre ouvrage, achevez mon malheur.

SALOME.

Puisque vous le voulez...

HÉRODE.

Frappe, voilà mon coeur.
Dis-moi qui m'a trahi ; mais, quoi qu'il en puisse être,
Songe que cette main t'en punira peut-être.
Oui, je te punirai de m'ôter mon erreur.
Parle à ce prix.

SALOME.

N'importe.

HÉRODE.

Eh bien !

SALOME.

C'est...