empire de l’esprit, et cet honneur d’être le modèle des autres peuples, soit une gloire frivole : ce sont les marques infaillibles de la grandeur d’un peuple. C’est toujours sous les plus grands princes que les arts ont fleuri, et leur décadence est quelquefois l’époque de celle d’un État. L’histoire est pleine de ces exemples ; mais ce sujet me mènerait trop loin. Il faut que je finisse cette lettre déjà trop longue, en vous envoyant un petit ouvrage qui trouve naturellement sa place à la tête de cette tragédie. C’est une épître en vers à celle qui a joué le rôle de Zaïre[1] : je lui devais au moins un compliment pour la façon dont elle s’en est acquittée :
Car le prophète de la Mecque
Dans son sérail n’a jamais eu
Si gentille Arabesque ou Grecque ;
Son œil noir, tendre et bien fendu,
Sa voix, et sa grâce intrinsèque,
Ont mon ouvrage défendu
Contre l’auditeur qui rebèque ;
Mais quand le lecteur morfondu
L’aura dans sa bibliothèque,
Tout mon honneur sera perdu.
Adieu, mon ami ; cultivez toujours les lettres et la philosophie, sans oublier d’envoyer des vaisseaux dans les échelles du Levant. Je vous embrasse de tout mon cœur.
- ↑ Voyez, parmi les poésies, l’Épître à Mademoiselle Gaussin.