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ZAÏRE
TRAGÉDIE




ACTE PREMIER.




Scène I.

ZAÏRE, FATIME.
fatime.

Je ne m’attendais pas, jeune et belle Zaïre,
Aux nouveaux sentiments que ce lieu vous inspire.
Quel espoir si flatteur, ou quels heureux destins
De vos jours ténébreux ont fait des jours sereins ?
La paix de votre cœur augmente avec vos charmes.
Cet éclat de vos yeux n’est plus terni de larmes ;
Vous ne les tournez plus vers ces heureux climats
Où ce brave Français devait guider nos pas !
Vous ne me parlez plus de ces belles contrées
Où d’un peuple poli les femmes adorées
Reçoivent cet encens que l’on doit à vos yeux ;
Compagnes d’un époux et reines en tous lieux,
Libres sans déshonneur, et sages sans contrainte,
Et ne devant jamais leurs vertus à la crainte !
Ne soupirez-vous plus pour cette liberté ?
Le sérail d’un soudan, sa triste austérité,
Ce nom d’esclave enfin, n’ont-ils rien qui vous gêne ?
Préférez-vous Solyme aux rives de la Seine ?

Zaïre.

On ne peut désirer ce qu’on ne connaît pas.
Sur les bords du Jourdain le ciel fixa nos pas.
Au sérail des soudans dès l’enfance enfermée,