Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome21.djvu/397

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entre le trône et l’amphithéâtre, étaient d’autres trônes et d’autres sièges pour les trois rois et pour tous les autres souverains qui seraient curieux de venir voir cette auguste cérémonie.

Le roi d’Égypte arriva le premier, monté sur le bœuf Apis, et tenant en main le sistre d’Isis. Il était suivi de deux mille prêtres vêtus de robes de lin plus blanches que la neige, de deux mille eunuques, de deux mille magiciens, et de deux mille guerriers.

Le roi des Indes arriva bientôt après dans un char traîné par douze éléphants. Il avait une suite encore plus nombreuse et plus brillante que le pharaon d’Égypte.

Le dernier qui parut était le roi des Scythes. Il n’avait auprès de lui que des guerriers choisis, armés d’arcs et de flèches. Sa monture était un tigre superbe qu’il avait dompté, et qui était aussi haut que les plus beaux chevaux de Perse, La taille de ce monarque, imposante et majestueuse, effaçait celle de ses rivaux ; ses bras nus, aussi nerveux que blancs, semblaient déjà tendre l’arc de Nembrod,

Les trois princes se prosternèrent d’abord devant Bélus et Formosante. Le roi d’Égypte offrit à la princesse les deux plus beaux crocodiles du Nil, deux hippopotames, deux zèbres, deux rats d’Égypte, et deux momies, avec les livres du grand Hermès, qu’il croyait être ce qu’il y avait de plus rare sur la terre.

Le roi des Indes lui offrit cent éléphants qui portaient chacun une tour de bois doré, et mit à ses pieds le Veidam, écrit de la main de Xaca[1] lui-même.

Le roi des Scythes, qui ne savait ni lire ni écrire, présenta cent chevaux de bataille couverts de housses de peaux de renards noirs.

La princesse baissa les yeux devant ses amants, et s’inclina avec des grâces aussi modestes que nobles.

Bélus fit conduire ces monarques sur les trônes qui leur étaient préparés, « Que n’ai-je trois filles ! leur dit-il, je rendrais aujourd’hui six personnes heureuses. » Ensuite il fit tirer au sort à qui essayerait le premier l’arc de Nembrod. On mit dans un casque d’or les noms des trois prétendants. Celui du roi d’Égypte sortit le premier ; ensuite parut le nom du roi des Indes. Le roi scythe, en regardant l’arc et ses rivaux, ne se plaignit point d’être le troisième.

Tandis qu’on préparait ces brillantes épreuves, vingt mille pages et vingt mille jeunes filles distribuaient sans confusion des

  1. Nom de Bouddha au Japon.