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MÉLANGES




LETTRE À M. D***
AU SUJET

DU PRIX DE POÉSIE DONNÉ PAR L’ACADÉMIE FRANÇAISE
EN L’ANNÉE 1714[1].

Monsieur,

Vous connaissez le pauvre du Jarry : c’est un de ces poëtes de profession qu’on rencontre partout, et qu’on ne voudrait voir nulle part ; nous l’appelons communément le gazetier du Parnasse. Il est parasite, afin qu’il ne lui manque rien de ce qui constitue un bel esprit du temps ; et il paye, dans un bon repas, son écot par de mauvais vers, soit de sa façon, soit de celle de ses confrères les poètes médiocres. Il nous montra, ces jours passés, un poëme imprimé, où on voyait à la première page ces mots écrits : À l’Immortalité. « C’est la devise de l’Académie française, nous dit-il ; la pièce n’est pas pourtant de l’Académie, mais elle l’a adoptée, et si ces messieurs l’avaient composée, ils ne s’y seraient jamais pris autrement que l’auteur. Il faut que vous

  1. C’est depuis 1821 seulement que cette pièce a été admise dans les Œuvres de Voltaire, encore n’en a-t-on jusqu’à ce jour imprimé qu’une très-petite partie. Je n’ai pu voir l’édition de cette Lettre, qui a dû être faite dans le temps. Mais on l’a réimprimée : 1° dans le volume intitulé Réflexions sur la rhétorique et sur la poésie, par M. de Fénelon, avec quelques autres pièces concernant l’Académie française, 1717, in-12 ; 2° dans le Recueil de divers traités sur l’éloquence et la poésie (par Bruzen de la Martinière), 1730, deux volumes in-12. En rendant compte de ce dernier recueil, le Nouvelliste du Parnasse (deuxième édition, II, 19), dit à propos de la Lettre : « On soupçonne que M. de V....... a autrefois composé cette lettre. » (B.)