de regarder la souveraine puissance comme un moyen de satisfaire ses passions, elle a conçu que la tranquillité du gouvernement dépendait de la tranquillité de son âme, et qu’il n’y a que les esprits doux et patients qui sachent se rendre véritablement maîtres des hommes. Elle a éloigné de sa pensée toute vengeance ; et, laissant à des hommes privés la honte d’exercer leur haine dès qu’ils le peuvent, elle a pardonné, comme les dieux, avec un plein pouvoir de punir. Elle a réprimé les esprits rebelles, moins parce qu’ils résistaient à ses volontés que parce qu’ils faisaient obstacle au bien qu’elle voulait faire ; elle a soumis ses pensées au conseil des sages, et tous les ordres du royaume à l’équité de ses lois ; elle a désarmé les ennemis étrangers par son courage et par la fidélité à sa parole, et elle a surmonté les ennemis domestiques par sa fermeté et par l’heureux accomplissement de ses projets. Il n’est jamais sorti de sa bouche ni un secret ni un mensonge, et elle a cru que la dissimulation nécessaire pour régner ne devait s’étendre que jusqu’au silence. Elle n’a point cédé aux importunités des ambitieux, et les assiduités des flatteurs n’ont point enlevé les récompenses dues à ceux qui servaient leur patrie loin de sa cour. La faveur n’a point été en usage sous son règne ; l’amitié même, qu’elle a connue et cultivée, ne l’a point emporté auprès d’elle sur le mérite, souvent moins affectueux et moins prévenant. Elle a fait des grâces à ses amis, et elle a donné des postes importants aux hommes capables. Elle a répandu des honneurs sur les grands, sans les dispenser de l’obéissance, et elle a soulagé le peuple sans lui ôter la nécessité du travail. Elle n’a point donné lieu à des hommes nouveaux de partager avec le prince, et inégalement pour lui, les revenus de son État ; et les derniers du peuple ont satisfait sans regret aux contributions proportionnées qu’on exigeait d’eux, parce qu’elles n’ont point servi à rendre leurs semblables plus riches, plus orgueilleux, et plus méchants. Persuadée que la providence des dieux n’exclut point la vigilance des hommes, qui est un de ses présents, elle a prévenu les misères publiques par des provisions régulières ; et, rendant ainsi toutes les années égales, sa sagesse a maîtrisé en quelque sorte les saisons et les éléments. Elle a facilité les négociations, entretenu la paix, et porté le royaume au plus haut point de la richesse et de la gloire par l’accueil qu’elle a fait à tous ceux que la sagesse de son gouvernement attirait des pays les plus éloignés ; et elle a inspiré à ses peuples l’hospitalité, qui n’était point encore assez établie chez les Égyptiens.
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CARACTÈRES ET PORTRAITS.