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CONTRE LE TESTAMENT POLITIQUE, ETC.


avait vu le manuscrit chez Mme d’Aiguillon, nièce du cardinal. Ne voilà-t-il pas de belles preuves ? Oui, je crois sans peine que tous ceux qui s’intéressaient à la mémoire du cardinal voulaient avoir un manuscrit qui portait son nom, et que l’auteur voulait accréditer par ce nom même ; et de là je conclus que ce manuscrit était manifestement supposé, puisque de tous les parents, de tous les domestiques, de tous les amis de ce ministre, aucun n’a jamais pris la moindre précaution pour établir l’authenticité du livre.

XXVI. Que la curiosité humaine se fatigue maintenant à chercher le nom du faussaire, je ne perdrai pas mon temps dans ce travail. Qu’importe le nom du fourbe, pourvu que la fourberie soit découverte ? qu’importe que Courtilz ou un autre ait forgé le testament de Mazarin, de Colbert et de Louvois ? qu’importe que Staatman ou Chévremont[1] ait pris insolemment le nom de Charles V, duc de Lorraine ? Mérite-t-on d’être connu pour avoir fait un mauvais livre ? Que gagnerait-on à connaître les auteurs de toutes les plates calomnies, de toutes les critiques impertinentes dont le public est inondé ? Il faut laisser dans l’oubli les auteurs qui se cachent sous un grand nom, comme ceux qui attaquent tous les jours ce que nous avons de meilleur, qui louent ce que nous avons de plus mauvais, et qui font de la noble profession des lettres un métier aussi lâche et aussi méprisable qu’eux-mêmes.

FIN DES MENSONGES IMPRIMÉS, ETC.
  1. Voyez la note de la page 430 ; et, tome XIX, la note 4 de la page 31.