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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome23.djvu/48

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MÉMOIRE DU SIEUR DE VOLTAIRE.

pour comble d’outrage, de le louer quelquefois, afin de donner plus de poids à vos injures, et tout cela pourquoi ! parce qu’il était logé, dites-vous, et nourri chez un autre : voilà la logique des ingrats.

Que M. de Voltaire eût été sans fortune : que M. de Bernières l’eût recueilli ; il n’y aurait rien là de déshonorant. Heureux les hommes puissants et riches qui s’attachent à des gens de lettres, qui se ménagent par là des secours dans leurs études, une société agréable, une instruction toujours prête ; mais M. de Voltaire et M. de Bernières n’étaient point dans ce cas ; et puisqu’il faut couper toutes les branches de la calomnie, on est obligé de rapporter un acte fait double, passé entre M. de Bernières et M. de Voltaire, le 4 mai 1723. Par cet acte, le sieur de Voltaire loue un appartement dans la maison du président de Bernières, pour la somme de six cents livres par an ; et s’accordent en outre à douze cents livres de pension pour lui et pour son ami[1] qui lui faisait l’honneur d’accepter la moitié de cet appartement ; même sa pension, son loyer, tout a été exactement payé ; la dernière quittance doit être entre les mains du sieur Arouet, trésorier de la chambre des comptes, frère du sieur de Voltaire ; et Mme la présidente de Bernières, qui a toujours eu une amitié inviolable pour M. de Voltaire, certifie tout ce qu’on est obligé d’avancer. On atteste son témoignage ; elle vient d’écrire la lettre la plus forte ; elle permet qu’on la montre à monseigneur le chancelier, aux principaux magistrats. Ils deviennent eux-mêmes témoins contre l’abbé Desfontaines avant d’être ses juges.

Oser dire que le sieur président de Bernières ait chassé de chez lui le sieur de Voltaire en 1726, c’est une imposture aussi grande que toutes les autres : ni l’un ni l’autre ne pouvait se donner congé ; jamais ils n’en eurent la moindre volonté ; jamais le moindre petit mécontentement domestique n’altéra leur union ; et c’est ce qui est encore attesté par la lettre de Mme de Bernières.

Quant à cet ami, témoin oculaire de votre libelle contre votre bienfaiteur, osez-vous bien affirmer qu’il dément aujourd’hui ce qu’il a dit tant de fois de bouche et par écrit, ce qu’il a confirmé en dernier lieu en présence de témoins respectables, dans son voyage à Cirey[2] ? En vain vous cherchez, comme vous avez tou-

  1. Thieriot.
  2. Voyez, sur la triste conduite de Thieriot en cette affaire, la Correspondance (1739), et Voltaire à Cirey, par M. Gust. Desnoireterres.