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DE L'EUROPE. 221

que nous, qu'il ne faut pas prodiguer ces actions terribles et déchirantes; que plus elles font d'impression, bien amenées, bien ménagées, plus elles sont impertinentes quand elles sont hors de propos. Une pièce mal écrite, mal débrouillée, obscure, chargée d'incidents incroyables, qui n'a de mérite que celui d'un panto- mime et d'un décorateur, n'est qu'un monstre dégoûtant.

Placez un tombeau dans 5(;/?zt>a/?us, osez faire paraître l'ombre de Ninus, que Ninias sorte de ce tombeau les bras teints du sang de sa mère, cela vous sera permis. Le respect pour l'antiquité, la mythologie, la majesté du sujet, la grandeur du crime, je ne sais quoi de sombre et de terrible répandu dans les premiers vers sur toute cette tragédie, transportent le spectateur hors de son siècle et de son pays ; mais ne répétez pas ces hardiesses ; qu'elles soient rares, qu'elles soient nécessaires : si elles sont inutilement prodi- guées, elles feront rire.

L'abus de l'action théâtrale peut faire rentrer la tragédie dans la barbarie. Que faut-il donc faire? Craindre tous les écueils ; mais comme il est plus aisé de faire une belle décoration qu'une belle scène, plus aisé d'indiquer des attitudes que de bien écrire, il est vraisemblable qu'on gâtera la tragédie en croyant la perfec- tionner.

��FI.\ DE L APPEL A TOUTES LES NATIONS.

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