Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome24.djvu/346

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

édifice ? La doctrine ? mais n’est-elle pas le comble de l’absurdité ?

Je crois, mes chers amis, vous avoir donné un préservatif suffisant contre tant de folies. Votre raison fera plus encore que mes discours : et plût à Dieu que nous n’eussions à nous plaindre que d’être trompés ! Mais le sang humain coule depuis le temps de Constantin pour l’établissement de ces horribles impostures. L’Église romaine, la grecque, la protestante, tant de disputes vaines, et tant d’ambitieux hypocrites, ont ravagé l’Europe, l’Afrique et l’Asie. Joignez, mes amis, aux hommes que ces querelles ont fait égorger, ces multitudes de moines et de nonnes devenus stériles par leur état. Voyez combien de créatures sont perdues, et vous verrez que la religion chrétienne a fait périr la moitié du genre humain.

Je finirai par supplier Dieu, si outragé par cette secte, de daigner nous rappeler à la religion naturelle, dont le christianisme est l’ennemi déclaré ; à cette religion sainte que Dieu a mise dans le cœur de tous les hommes, qui nous apprend à ne rien faire à autrui que ce que nous voudrions être fait à nous-mêmes. Alors l’univers serait composé de bons citoyens, de pères justes, d’enfants soumis, d’amis tendres. Dieu nous a donné cette religion en nous donnant la raison. Puisse le fanatisme ne la plus pervertir ! Je vais mourir plus rempli de ces désirs que d’espérances.




Voilà le précis exact du Testament in-fol. de Jean Meslier. Qu’on juge de quel poids est le témoignage d’un prêtre mourant qui demande pardon à Dieu. Ce 15 mars 1742.



fin de l’extrait.