Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome24.djvu/389

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A MONSEIGNEUR

LE CHANCELIER-

��De Châtelaine, 7 juillet 17fi2. Monseigneur,

S'il est permis à un sujet d'implorer son roi, s'il est permis à un fils, à un frère, de parler pour son père, pour sa mère et pour son frère, je me jette à vos pieds avec confiance.

Toute ma famille et le fils d'un avocat célèbre, nommé La- vaisse, ont tous été accusés d'avoir étranglé et pendu un de mes frères, pour cause de religion, dans la ville de Toulouse. Le par- lement a fait périr mon père par le supplice de la roue. C'était un vieillard de soixante-huit ans, que j'ai vu incommodé des jambes. Vous sentez, monseigneur, qu'il est impossible qu'il ait pendu seul un jeune homme de vingt-huit ans, dix fois plus fort que lui. Il a protesté devant Dieu de son innocence en expirant. Il est prouvé par le procès-verbal que mon père n'avait pas quitté un instant le reste de sa famille, ni le sieur Lavaisse, pendant qu'on suppose qu'il commettait ce parricide.

Mon frère Pierre Calas, accusé comme mon père, a été banni: ce qui est trop, s'il est innocent, et trop peu, s'il est coupable. Malgré son bannissement on le retient dans un couvent, à Tou- louse.

Ma mère, sans autre appui que son innocence, ayant perdu tout son bien dans cette cruelle affaire, ne trouve encore per- sonne qui la présente devant vous. J'ose, monseigneur, parler en son nom et au mien ; on m'assure que les pièces ci-jointes - feront

��1. Le chancelier était alors Lamoignon, père de Malesherhes ; N.-R. Berryer était garde des sceaux. (B.)

2. Les Pièces originales; voyez page 365.

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