Quel est le remède à ce mal ? La raison, qui se fait entendre à la fin, quand les passions sont lasses de crier. Alors les deux partis relâchent un peu de leurs prétentions dans la crainte de pis ; mais il faut du temps.
Dans une petite république le peuple semble devoir être plus écouté que dans une grande, parce qu’il est plus aisé de faire entendre raison à mille personnes assemblées qu’à quarante mille. Ainsi il y aurait eu beaucoup de danger à vouloir gouverner Venise, qui a si longtemps soutenu la guerre contre l’empire ottoman, comme Saint-Martin, qui n’a jamais pu conquérir qu’un moulin, qu’elle a été forcée de rendre.
Il paraît bien étrange que l’auteur du Contrat social[1] s’avise de dire que tout le peuple anglais devrait siéger en parlement, et qu’il cesse d’être libre quand son droit consiste à se faire représenter au parlement par députés. Voudrait-il que trois millions de citoyens vinssent donner leur voix à Westminster ? Les paysans en Suède comparaissent-ils autrement que par députés ?
On dit, dans ce même Contrat social[2], que « la monarchie ne convient qu’aux nations opulentes ; l’aristocratie, aux États médiocres en richesse ainsi qu’en grandeur ; la démocratie, aux États petits et pauvres ».
Mais, au XIVe siècle, au XVe, et au commencement du XVIe, les Vénitiens étaient le seul peuple riche : ils ont encore beaucoup d’opulence ; cependant Venise n’a jamais été et ne sera jamais une monarchie. La république romaine fut très-riche depuis les Scipions jusqu’à César. Lucques est petite et peu riche, et est une aristocratie ; l’opulente et ingénieuse Athènes était un État démocratique.
Nous avons des citoyens très-riches, et nous composons un gouvernement mêlé de démocratie et d’aristocratie : ainsi il faut