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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome25.djvu/190

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480 ARTICLES EXTRAITS

la Chevelure de Bérénice. L'ouvrage renferme différentes versions latines, un grand nombre de leçons ou variantes, et des notes très-bien choisies.

On ne trouve dans Callimaque ni les élans sublimes, ni les figures hardies, ni les expressions étincelantes de Pindare; ses hymnes ressemblent plutôt à ceux qu'on attribue à Homère : c'est à peu près la même marche et le même ton. Quant à sa versi- fication, elle est douce, élégante, et très-soignée. M. l'abbé Ter- rasson prétendait même qu'elle est supérieure à celle d'Homère. Cet académicien était au nombre des gens de lettres du siècle dernier qui confondaient les progrès des arts avec les progrès de la philosophie. Parce que les modernes sont plus grands géo- mètres que ne l'étaient les anciens, M. l'abbé Terrasson affirmait qu'ils sont aussi plus grands poètes et plus grands orateurs. Il ne faisait pas attention que la poésie est fdle de l'imagination, comme l'éloquence l'est de la liberté ; que plus les facultés cri- tiques se perfectionnent, plus l'imagination s'émousse; et qu'au- tant les mœurs des anciens étaient poétiques, autant les mœurs présentes résistent à la poésie.

Comme de tous les ouvrages de Callimaque les moins connus sont ses épigrammes, nous en rapporterons deux.

(c C'est dans ces lieux, fait-il dire à Timon le Misanthrope, que pour me dérober au commerce des humains j'ai choisi mon habitation : qui que tu sois, passe ; accable-moi, si tu veux, d'in- vectives et d'imprécations, mais passe. »

« Acanthius, fils de Dicon, dort ici d'un sommeil sacré. Car ne dites jamais que les bons meurent. »

Avant de finir cette notice, nous ferons observer que les an- ciens n'attachaient point à l'épigramme l'idée que nous en avons aujourd'hui : ils ne cherchaient pas toujours à terminer ce genre de poëme par quelque chose de piquant et d'inattendu ; toutes les conditions en étaient remphes lorsque fobjet y était énoncé avec élégance et avec précision. Ce n'est pas que, dans le recueil des épigrammes anciennes, on n'en trouve de très-délicates et de très-ingénieuses ; nous aurons occasion d'en faire connaître un grand nombre dont rien n'égale la finesse. Qu'il nous soit permis, en attendant, de citer celle-ci sur la statue de Vénus qu'on adorait à Cnide, et qu'avait faite Praxitèle :

Cypris passait à Cnide; elle y trouva Cypris^. « ciel ! dit la déesse émue,

1. KvTtpi; eios KÛTrpiv. (Note des auteurs de la Gazette littéraire.)

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