280 DOUTES SUR LE TESTAMENT
grands efforts de génie pour rappeler quelques petites anecdotes, quelques circonstances de la vie privée d'un prince, d'un mi- nistre, et pour savoir les appliquer? N'est-ce pas un artifice com- mun, pratiqué non-seulement par tous ceux qui se sont avisés de forger des Testaments politiques, mais par les auteurs de tous les faux mémoires dont nous sommes inondés?
« Vous avez déterré, comme moi, un misérable manuscrit plein d'antithèses et d'hyperboles, digne du pédant Granger, in- titulé Testamentmn politicum. Il paraît que cette rapsodie pouvait annoncer à toute force un ouvrage plus étendu; et de là vous inférez que le cardinal de Richelieu pourrait bien avoir part à cet ouvrage plus étendu, et que c'est son testament politique! A quoi est-on réduit en tout genre quand on veut prouver ce qui est improbable!
« Nous pouvons, monsieur, mettre au rang des mensonges imprimés le petit traité du capucin Joseph, De l'Unité du ministre, présenté à Louis Xlin.
(( De bonne foi pensez-vous qu'un capucin ait donné un mé- moire au roi, par lequel il lui enseignait qu'il fallait qu'un roi « crût en tout son premier ministre, qu'il ne crût rien contre son « premier ministre, qu'il révélât à son premier ministre tout ce « qu'on lui dirait contre lui, qu'il comblât d'honneurs et de biens « son premier ministre, qu'il donnât une autorité sans bornes à « son premier ministre » ? Est-il bien vraisemblable qu'un grand homme se soit servi, auprès d'un maître très-défiant, d'un arti- fice si grossier? Si un capucin, ami de votre maître-d'hôtel, venait vous présenter un pareil mémoire, vous renverriez le capucin dans son couvent, et vous pourriez bien vous défaire de votre maître-d'hôtel,
(( Souffrez qu'après avoir fait avec vous ces petites réflexions, et avoir jusqu'ici écrit en critique sur cette matière, j'ose vous parler à présent en citoyen.
(( Parmi les maximes très-triviales dont le Testament politique est plein, il y en a de fort dures. Parmi les conseils qu'on ose y donner, il y en a de bien violents. L'auteur du Testament a cru qu'en faisant parler le cardinal de Richelieu, il fallait le faire parler en homme d'une sévérité outrée, comme Corneille, en mettant les anciens Romains sur le théâtre, leur a donné quel- quefois plus d'orgueil et de férocité qu'ils n'en avaient, ou plutôt
��1. Voyez tome XIII, page 15. L'ouvrage attribué au Père Joseph l'Homme du pape et du roi, 1034, in-4o.
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