Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome25.djvu/87

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
77
EXTRÊME TOLÉRANCE DES JUIFS.

d’or, laissés par David et ses officiers pour la construction de la maison du Seigneur : ce qui, sans compter les deniers employés par Salomon, monte à la somme de dix-neuf milliards soixante-deux millions, ou environ, au cours de ce jour. Jamais idolâtrie ne fut plus récompensée. Je sais que ce compte est exagéré, qu’il y a probablement erreur de copiste ; mais réduisez la somme à la moitié, au quart, au huitième même, elle vous étonnera encore. On n’est guère moins surpris des richesses qu’Hérodote dit avoir vues dans le temple d’Éphèse. Enfin les trésors ne sont rien aux yeux de Dieu, et le nom de son serviteur, donné à Nabuchodonosor, est le vrai trésor inestimable.

[1]Dieu ne favorise pas moins le Kir, ou Koresh, ou Kosroès, que nous appelons Cyrus ; il l’appelle son christ, son oint, quoiqu’il ne fût pas oint, selon la signification commune de ce mot, et qu’il suivît la religion de Zoroastre ; il l’appelle son pasteur, quoiqu’il fût usurpateur aux yeux des hommes : il n’y a pas dans toute la sainte Écriture une plus grande marque de prédilection.

Vous voyez dans Malachie[2] que « du levant au couchant le nom de Dieu est grand dans les nations, et qu’on lui offre partout des oblations pures ». Dieu a soin des Ninivites idolâtres comme des Juifs ; il les menace, et il leur pardonne. Melchisédech, qui n’était point Juif, était sacrificateur de Dieu. Balaam, idolâtre, était prophète. L’Écriture nous apprend donc que non-seulement Dieu tolérait tous les autres peuples, mais qu’il en avait un soin paternel : et nous osons être intolérants !


CHAPITRE XIII.


EXTRÊME TOLÉRANCE DES JUIFS.


Ainsi donc, sous Moïse, sous les juges, sous les rois, vous voyez toujours des exemples de tolérance. Il y a bien plus[3] : Moïse dit plusieurs fois que « Dieu punit les pères dans les enfants jusqu’à la quatrième génération » ; cette menace était nécessaire à un peuple à qui Dieu n’avait révélé ni l’immortalité de l’âme, ni les peines et les récompenses dans une autre vie. Ces vérités ne lui furent annoncées ni dans le Décalogue, ni dans aucune loi du

  1. Isaïe, ch. xliv et xlv. (Note de Voltaire.)
  2. I, ii.
  3. Exode, chap. xx, v. 5. (Note de Voltaire.)