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318 L'A, B, C.

afin de faire le mal en conscience ; il se peut que quelques doc- leurs musulmans aient imité les docteurs catholiques, qui ont dit qu'il ne faut garder la foi ni aux infidèles ni aux hérétiques; mais il reste à savoir si cette jurisprudence est celle des Turcs.

L'auteur de l' Esprit des lois donne cette prétendue décision des cadis comme un preuve du despotisme du sultan ; il semhle que ce serait au contraire une preuve qu'il est soumis aux lois, puis- qu'il serait obligé de consulter des docteurs pour se mettre au- dessus des lois. Nous sommes voisins des Turcs, et nous ne les connaissons pas\ Le comte de Marsigh, qui a vécu si longtemps au milieu d'eux, dit qu'aucun auteur n'a donné une véritable connaissance ni de leur empire, ni de leurs lois. Nous n'avons eu même aucune traduction tolérable de VAlcoran, avant celle que nous a donnée l'Anglais Sale- en 173/j. Presque tout ce qu'on a dit de leur religion et de leur jurisprudence est faux, et les conclusions que l'on en tire tous les jours contre eux sont trop peu fondées. On ne doit, dans l'examen des lois, citer que des lois reconnues.

« 3 Tout bas commerce était infâme chez les Grecs. » Je ne sais pas ce que Montesquieu entend par bas commerce; mais je sais que, dans Athènes, tous les citoyens commerçaient, (jue Platon vendit de l'huile, et que le père du démagogue Démosthène était marchand de fer. La plupart des ouvriers étaient des étran- gers ou des esclaves : il nous est important de remarquer que le négoce n'était point incompatible avec les dignités dans les répu- bliques de la Grèce, excepté chez les Spartiates, qui n'avaient aucun commerce.

« J'ai ouï plusieurs fois déplorer, dit-il \ l'aveuglement du conseil de François I", qui rebuta Christophe Colomb qui lui proposait les Indes. » Vous remarquerez que François I" n'était pas né lorsque Colomb découvrit les îles de l'Amérique.

Puisqu'il s'agit ici de commerce, observons que l'auteur con- damne une ordonnance du conseil d'Espagne qui défend d'em- ployer l'or et l'argent en dorure ^ « Un décret pareil, dit-il, serait semblable à celui que feraient les états de Hollande s'ils défen- daient la consommation de la cannelle. » Il ne songe pas que les Espagnols, n'ayant point de manufactures, auraient acheté les

1. Voyez tome XII, pages 103 et suiv.

2. Voyez tome XXIV, pages 14'2, 55G.

3. Liv. IV, ch. viir. {Note de Voltaire.)

4. Liv. XXI, ch, xxa. (Id.)

5. Ibid. ( Id.)

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