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80 D1SC0URS AUX CONFÉDÉRÉS CATHOLIQUES.

Il m'en cita une trentaine de cette force; après quoi il ajouta :

« Je n'ai qu'un regret, c'est de n'avoir pas été inquisiteur; il me semble que j'aurais été bien plus utile à l'Église.

— Ah ! mon révérend père, lui répondis-je, il y a une place encore plus digne de vous, c'est celle de maître des hautes- œuvres : ces deux charges ne sont pas incompatibles, et je vous conseille d'y penser, »

Il me répliqua que tout bon chrétien est tenu d'exercer ces deux emplois, quand il s'agit de la vierge Marie ; il cita plusieurs exemples dans ce siècle même, dans ce siècle philosophique, de jeunes gens appliqués à la torture, mutilés, décollés, brûlés, rompus vifs, expirants sur la roue, pour n'avoir pas assez révéré les portraits parfaitement ressemblants de la sainte Vierge, ou pour avoir parlé d'elle avec inconsidération ^

Mes chers Polonais, ne frémissez-vous pas d'horreur à ce récit? Voilà donc la religion dont vous prenez la défense!

Le roi mon maître- a fait répandre le sang, il est vrai; mais ce fut dans les batailles, ce fut en exposant toujours le sien ; jamais il n'a fait mourir, jamais il n'a persécuté personne pour la vierge Marie. Luthériens, calvinistes, hernoutres ^, piétistes, ana- baptistes, mennonites, millénaires, méthodistes, tartares, lamistes, turcs omaristes, persans alistes, papistes même, tout lui est bon, pourvu qu'on soit un brave homme. Imitez ce grand exemple ; soyons tous bons amis, et ne nous battons que contre les Turcs, quand ils voudront s'emparer de Kaminieck.

Vous dites pour vos raisons que si vous souffrez parmi vous des gens qui communient avec du pain et du vin, et qui ne croient pas que le Paraclet procède du Père et du Fils, bientôt vous aurez des nestoriens qui appellent Marie mère de Jésus, et non mère de Dieu, titre que les anciens Grecs donnaient à Cybèle;

1. Voltaire veut rappeler l'aventuro du chevalier de La Barre; voyez tome XXV, page 501.

2. Frédéric II.

3. Hernhutes ou Hernhuters, secte d'enthousiastes introduite de nos jours en Moravie, en Vétéravie, en Hollande et en Angleterre. Ses partisans sont encore connus sous le nom de frères moraves : mais il ne faut pas les confondre avec les frères de Moravie, ou les Huttérites, qui étaient une branche d'anabaptistes... Les Hernhutes sont aussi nommés Zinzendorflens par quelques auteurs. En effet, le hernhutisme doit son origine et ses progrès au comte Nicolas-Louis de Zinzer- dorf, né en 1700, et élevé à Hall, sur les principes du quiétisme... La mon- tagne de Hutberg leur donna lieu d'appeler leur habitation Hut-der-hern, et dans la suite Hernhut, nom qui peut signifier la garde ou la protection du Seigneur. C'est de là que toute la secte a pris le sien. (Note extraite de l'Encyclopédie méthodique, Théologie.) (B.)

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