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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome28.djvu/401

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ÉCRITE DE GENÈVE. 391

11 est juste que les pairs assemblés en parlement ou hors du parlement puissent faire au roi, dans les occasions, de très-hum- bles représentations, comme des enfants en font à leur père. Il n'y a point de corps dans l'État, point de citoyen même, qui ne soit en droit de porter ses prières au pied du trône.

Les corps de ville surtout semblent faits principalement pour parler au nom des villes, quand il s'agit de finances, de com- merce et d'impositions ; ils connaissent les besoins et les res- sources des peuples. Les parlements ont étudié les lois, mais les magistrats municipaux sont instruits des forces de la nation, et de ce qu'elle peut porter de fardeaux : il semble que leur voix mérite surtout d'être écoutée.

Si on augmente la taille, le taillon, l'ustensile et tous les im- pôts qui tombent sur le cultivateur, ce n'est pas un parlement qui les paye, mais une partie des officiers municipaux porte cette charge. Les corps de ville sont donc beaucoup plus intéressés que le parlement à implorer la justice et la bonté du gouver- nement.

Le gouvernement lui-même est bien plus intéressé encore à modérer les fardeaux : car, s'ils sont trop pesants, le peuple y suc- combe, la cam[)agne est ruinée, l'industrie périt avec elle, les finances du roi diminuent, et il est hors d'état d'acquitter les dettes qu'il a contractées.

Quand le malheur des temps est parvenu à cet excès, comme en 1709 et en 1720, alors toutes les voix doivent se faire entendre au monar([ue; la vérité se fait sentir de toutes parts.

11 est impossible que le roi veuille ruiner la nation pour se ruiner lui-même.

Je n'examine point quelle a été la cause du grand changement (|ue nous voyons. Il se peut que d'un mal il soit né un très-grand bien; il se peut que le parlement ait poussé trop loin son zèle. Peut-être même aura-t-il pris pour du zèle patriotique l'amour si naturel de sa propre autorité. Il peut arriver quel(juefois qu'une compagnie de magistrats montre plus de cette inllexibilité qui gâte les affaires que de cette sage condescendance qui les con- cilie.

Mais quelle que soit la première origine de la révolution pré- sente, il est certain que rien n'est plus utile, par conséquent rien n'est plus beau.

Si le roi joint, en effet, à la bonté qu'il a de vous faire rendre la justice gratuitement, celle d'abréger par un nouveau code les formalités de cette justice, si lente et si épineuse; si l'esprit phi-

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