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LES PEUPLES
AUX PARLEMENTS[1].
(1771)

Organes respectables des lois, créés pour les suivre et non pour les faire, écoutez le roi, et daignez aussi écouter les peuples.

Si la nation anglaise dispute aujourd’hui ses droits aux états généraux d’Angleterre, appelés parlement, permettez-nous de représenter les nôtres, à vous, tribunaux, nommés parlements, qui n’êtes point les états.

Vous êtes hommes, vous avez tout ce qui est dans la nature de l’homme, le sentiment de l’honneur, la jalousie de vos droits, l’esprit de corps, l’amour du pouvoir ; vous prétendez tous aux respects qu’on doit à vos utiles travaux. Souffrez donc que d’autres corps supérieurs à vous aient les mêmes sentiments, ou, si vous voulez, les mêmes passions.

« Au milieu du palais auguste, et presque sous le trône de nos rois, s’élève, sous le nom de conseil, un tribunal souverain, où l’on réforme les jugements, et où l’on juge les justices. C’est là que la faible innocence vient se mettre à couvert de l’ignorance ou de la malice des magistrats qui la poursuivent. C’est de là que partent ces foudres qui vont consumer l’iniquité jusqu’aux

  1. Cet écrit est incontestablement de Voltaire ; voyez la lettre à Richelieu, du 20 mai 1771 ; il s’en fit plusieurs éditions que je n’ai pu me procurer. Le chancelier en fit faire une avec quelques changements. Quoiqu’il fût très-content (dit Voltaire dans sa lettre à Richelieu, du 3 juin 1771), Maupeou avait changé deux mots et fait réimprimer la chose. J’ai cette édition Maupeou, qui présente, en effet, deux différences avec le texte qu’on trouve dans le tome XI des Nouveaux Mélanges. C’est ce texte que j’ai suivi. J’ai indiqué en note les suppressions faites par le chancelier : elles portent sur deux phrases où le duc de Choiseul était loué, et qui ne devaient pas flatter le chancelier, mais qui prouvent que Voltaire n’était pas ingrat. ( B.)