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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome28.djvu/433

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L'ÉQUIVOQUE. 423

volontés des rois qui se conformaient aux temps. Vous le savez mieux que moi ; et quiconque est un peu versé dans notre his- toire en est assez convaincu.

La vénalité honteuse des charges de judicature fut le triste effet du dérangement des finances sous François I", et prouve assez que, quand ce premier ressort du gouvernement est détra- qué, tout le reste de la machine se ressent d'un défaut qui pro- duit tous les autres.

Un roi sage, placé sur le trône depuis plus longtemps qu'au- cun des monarques ses contemporains ; un roi sorti de la plus ancienne maison qui ait jamais régné, veut, après cinquante-six ans consumés dans les fatigues et dans les vicissitudes du gou- vernement, délivrer la France de cet opprobre de la vénalité, opprobre dont elle seule est souillée sur la terre. Il forme six conseils dans les provinces, qui rendront sans frais' la justice; le ressort du parlement de Paris en est moins vaste, mais les provinces sont soulagées; des familles entières ne sont plus traî- nées en foule, de cent lieues, dans les i)risons de la Conciergerie, sur des accusations frivoles. La multiplicité et le torrent des affaires ne forcent plus la Tournelle à jeter un coup d'œil rapide sur des procès criminels, instruits par des juges subalternes, ignorants, et à livrer des innocents aux plus affreux supplices: cruels exemples dont nous n'avons que trop de preuves!

Les seigneurs, dans leurs terres, peuvent faire exécuter les lois, et maintenir la justice aux dépens du roi; ils ne sont plus dans la nécessité douloureuse de laisser impuni le meurtre, et de dérober le criminel à la juste sévérité des lois, dans la crainte d'être ruinés pour avoir rendu justice.

Il faut être sans cœur et sans raison pour ne pas rendre grâces au roi, dans la génération présente, d'un bienfait ([ui sera reconnu dans la dernière postérité. Si Dieu envoyait sur la terre un mi- nistre de ses volontés célestes pour réformer nos abus, il com- mencerait par faire ce que fait Louis XV dans cette partie de l'administration.

Et vous, par où commencez-vous? Par déclarer que les bien- faits du roi sont des oppressions ; par défendre qu'on obéisse aux ordres les plus salutaires ; par nous interdire la jouissance de ses bontés ; par ordonner qu'on ne reconnaisse point ces conseils supérieurs, institués par la même autorité sacrée qui créa les parlements.

Le roi tire de son grand conseil, qui était autrefois le conseil royal, et de quelques autres tribunaux, des officiers qui forment

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