Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome28.djvu/481

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texte et l'ambition pour cause. On verra renaître en France ces temps affreux où les papes persécutaient, déposaient, assassinaient les empereurs Henri IV, Henri V, Frédéric Ier, Frédéric II, et tant d’autres en Allemagne et en Italie. La France nagera dans le sang. Nos rois expireront sous le couteau des Aod, des Samuel, des Joad, et de cent fanatiques.

(c Vous auriez pu détourner ces fléaux ; et c’est vous qui les préparez. Certes, une telle infamie n’aurait point été commise par ces grands hommes qui inventèrent l’appel comme d’aljus \ qui déférèrent au concile de Fisc Jules II, ce prêtre soldat, ce boute-feu de l’Europe ; qui s’élevèrent si hautement contre les crimes d’Alexandre VI, et qui, depuis leur institution, furent les gardiens des lois et les organes de la justice.

« L’honneur de l’ancienne chevalerie gouvernait alors la grand’chambre, composée originairement de nobles, égaux pour le moins à ces seigneurs étrangers qui vous ont subjugués, qui vous tyrannisent et qui vous payent.

a Vous avez vendu ma tête : le prix sera bien médiocre, la honte sera grande ; mais, en vous vendant aux Guises, vous vous êtes mis au-dessus de la honte.

« Votre jugement contre quelques autres de nos confrères est moins cruel, mais il n’est ni moins absurde, ni moins ignominieux. Vous condamnez le sage Paul de Foix et l’intrépide Dufaur à demander pardon à Dieu, au roi et à la justice, d’avoir dit qu’il faut convertir les réformateurs par des raisons, par des mœurs pures, et non par des supplices ; et, pour joindre le ridicule à l’atrocité de vos arrêts, vous ordonnez que Paul de Foix déclare, devant les chambres assemblées, que la forme est inséparable de la matière dans l’eucharistie : qu’a de commun ce galimatias péripatétique avec la religion chrétienne, avec les lois du royaume, avec les devoirs d’un magistrat, avec le bon sens? De quoi vous mêlez-vous ? Est-ce à vous de faire les théologiens ? N’est-ce pas assez des absurdités de Cujas et de Bartole, sans y comprendre encore celles de Thomas d’Aquin, de Scot, et de Bonaventure ?

(( Ne rougissez-vous pas de croupir aujourd’hui dans l’ignorance du xiv^ et du XV" siècle, quand le reste du monde commence à s’éclairer? Serez-vous toujours tels que vous étiez sous Louis XI, quand vous fîtes saisir les premières éditions imprimées de l'Évangile et de l'Imitation de Jésus-Christ que vous appor-

1. Voyez tome XVII, page 45.