Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome28.djvu/484

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474 LETTRE

L'art d'une main enchanteresse Ne cherche point à t'y louer. Laissons la louange insipide Pour ces mortels peu délicats Que de la vérité l'ombre même intimide, Et que l'encens n'affadit pas. C'est un poison qu'en nos chmats Une complaisance perfide Prépara pour la vanité. La fable, de la vérité Est une image réfléchie ; C'est un miroir où l'on n'est point flatté Je foffre sa glace fidèle, Voltaire^ tu t'y connaîtras. ]\Iais, ô toi, mon autre modèle. Maudit geai, tu la terniras.

��LE ROSSIGNOL ET LE GEAL

FAB LE.

Dès son printemps, dès son jeune âge, Un rossignol, par son ramage, Dans ses cantons s'était fait respecter; 11 enchantait son voisinage. On se taisait pour l'écouter. Sa voix plaisait aux cœurs, plus encor qu'aux oreilles, Et ses fredonnements même étaient des merveilles. Un geai fort sot, fort ennuyeux Et fort bavard, c'est l'ordinaire, Ne put entendre sans colère Du rossignol les chants délicieux. Le mérite d'autrui le rendait envieux.

Pourquoi? Le voici sans mystère. C'est qu'il n'en avait point. Il n'avait plu jamais,

Et ne voulait que tout autre pût plaire. Or, envers maître geai, sur ce point très-sévère, Le rossignol avait des torts très-vrais : On l'admirait. Témoin de ses succès, Jacque enrageait, et lui fit son procès. Au chanteur, au bon goût, il déclara la guerre, A sa langue il donna carrière. De son babil étourdit les forêts. Outrage, injure journalière, 11 porta tout aux plus grossiers excès. Que fit messire Jacque? Oh! de l'eau toute claire.

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