Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome28.djvu/529

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
519
OU LE PRINCIPE D'ACTION.

Il faut que le principe soit unique. Une uniformité constante dans les lois qui dirigent la marche des corps célestes, dans les mouvements de notre globe, dans chaque espèce, dans chaque genre d'animal, de végétal, de minéral, indique un seul moteur. S'il y en avait deux, ils seraient ou divers, ou contraires, ou semblables. Si divers, rien ne se correspondrait ; si contraires, tout se détruirait ; si semblables, c'est comme s'il n'y en avait qu'un : c'est un double emploi.

Je me confirme dans cette idée qu'il ne peut exister qu'un seul principe, un seul moteur, dès que je fais attention aux lois constantes et uniformes de la nature entière.

La même gravitation pénètre dans tous les globes, et les fait tendre les uns vers les autres en raison directe, non de leurs surfaces, ce qui pourrait être l'effet de l'impulsion d'un fluide, mais en raison de leurs masses.

Le carré de la révolution de toute planète est comme la racine du cube de sa distance au soleil (et cela prouve, en passant, ce que Platon avait deviné, je ne sais comment, que le monde est l'ouvrage de l'éternel géomètre).

Les rayons de lumière ont leurs réflexions et leurs réfractions dans toute l'étendue de l'univers. Toutes les vérités mathématiques doivent être les mêmes dans l'étoile Sirius et dans notre petite loge.

Si je porte ma vue ici-bas sur le règne animal, tous les quadrupèdes, et les bipèdes qui n'ont point d'ailes, perpétuent leur espèce par la même circulation ; toutes les femelles sont vivipares.

Tous les oiseaux femelles pondent des œufs.

Dans toute espèce, chaque genre peuple et se nourrit uniformément.

Chaque genre de végétal a le même fonds de propriétés.

Certes, le chêne et le noisetier ne se sont pas entendus pour naître et croître de la même façon, de même que Mars et Saturne n'ont pas été d'intelligence pour observer les mêmes lois. Il y a donc une intelligence unique, universelle et puissante, qui agit toujours par des lois invariables.

Personne ne doute qu'une sphère armillaire, des paysages, des animaux dessinés, des anatomies en cire colorée, ne soient des ouvrages d'artistes habiles. Se pourrait-il que les copies fussent d'une intelligence, et que les originaux n'en fussent pas ? Cette seule idée me paraît la plus forte démonstration, et je ne conçois pas comment on peut la combattre.