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DISCOURS

préceptes que vous ont donnés les apôtres. Leurs premiers successeurs les ont altérés par une impiété et une méchanceté qui ne peuvent être assez blâmées. Ni Paul, ni Matthieu, ni Luc, ni Marc, n’ont osé dire que Jésus fût un Dieu ; mais lorsque Jean eut appris que, dans plusieurs villes de la Grèce et de l’Italie, beaucoup de personnes parmi le peuple étaient tombées dans cette erreur ; sachant d’ailleurs que les tombeaux de Pierre et de Paul commençaient d’être honorés, qu’on y priait en secret, il s’enhardit jusqu’à dire que Jésus était Dieu. « Le Verbe, dit-il, s’est fait chair et a habité dans nous. » Mais il n’a pas osé expliquer de quelle manière, car en aucun endroit il ne nomme ni Jésus ni Christ, lorsqu’il nomme Dieu et le Verbe. Il cherche à nous tromper d’une manière couverte, imperceptiblement, et peu à peu. Il dit que Jean-Baptiste avait rendu témoignage à Jésus, et qu’il avait déclaré que c’était lui qui était le Verbe de Dieu.

Je ne veux point nier que Jean-Baptiste n’ait parlé de Jésus dans ces termes, quoique plusieurs irréligieux parmi vous prétendent que Jésus-Christ n’est point le Verbe dont parle Jean. Pour moi, je ne suis pas de leur sentiment, puisque Jean dit, dans un autre endroit, que le Verbe qu’il appelle Dieu, Jean-Baptiste a reconnu que c’était ce même Jésus. Remarquons actuellement avec combien de finesse, de ménagement et de précaution, se conduit Jean. Il introduit avec adresse l’impiété fabuleuse qu’il veut établir ; il sait si bien se servir de tous les moyens que la fraude peut lui fournir que, parlant derechef d’une façon ambiguë, il dit : « Personne n’a jamais vu Dieu. Le Fils unique, qui est au sein du Père, est celui qui nous l’a révélé. » Il faut que ce fils, qui est dans le sein de son père, soit ou le Dieu verbe, ou un autre fils. Or si c’est le Verbe, vous avez nécessairement vu Dieu, puisque « le Verbe a habité parmi vous, et que vous avez vu sa gloire ». Pourquoi Jean dit-il donc que jamais « personne n’a vu Dieu » ? Si vous n’avez pas vu Dieu le Père,


    des maisons d’Autriche et de France, des guelfes et des gibelins, de la rose blanche et de la rose rouge, n’en ont jamais répandu. Si les campagnes ont été couvertes de cadavres pendant ces guerres, les villes ont été hérissées d’échafauds pendant la paix. Il semble que les pharisiens, en assassinant le Dieu des chrétiens sur la croix, aient appris à ses suivants à s’assassiner les uns les autres ? sous le glaive, sur la potence, sur la roue, dans les flammes. Persécutés et persécuteurs, martyrs et bourreaux tour à tour, également imbéciles, également furieux, ils tuent et ils meurent pour des arguments dont les prélats et les moines se moquent en recueillant les dépouilles des morts et l’argent comptant des vivants. » (Note de Voltaire.)