pas en Europe d’auteurs qui ont copié au hasard des écrivains asiatiques plus ampoulés que vrais, comme ils le sont presque tous.
Parmi ces énormes compilations, nous avons l’Introduction à l’histoire générale et politique de l’univers, commencée par M. le baron de Pufendorf, complétée et continuée jusqu’à 1745 par M. Bruzen de La Martinière, premier géographe de Sa Majesté catholique, secrétaire du roi des Deux-Siciles et du conseil de Sa Majesté.
Cet écrivain, d’ailleurs homme de mérite, avait le malheur de n’être en effet que le secrétaire des libraires de Hollande. Il dit[1] que Tamerlan entama les Indes par ses ravages au Caboulestan, et revint, sur la fin du xive siècle, dans ce même Caboulestan qui avait cru pouvoir secouer impunément sa domination, et qu’il châtia les rebelles. Le secrétaire d’un valet de chambre de Tamerlan aurait pu s’exprimer ainsi. J’aimerais autant dire que Cartouche châtia des gens qu’il avait volés, et qui voulaient reprendre leur argent.
Il paraît par notre auteur persan que Tamerlan fut obligé de quitter l’Inde, après en avoir saccagé tout le nord ; qu’il n’y revint plus ; qu’aucun de ses enfants ne s’établit dans cette conquête. Ce ne fut point lui qui porta la religion mahométane dans l’Inde : elle était déjà établie longtemps avant lui dans Delhi et ses environs. Mahmoud, chassé par Tamerlan, et revenu ensuite dans ses États pour en être chassé par d’autres princes, était mahométan. Les Arabes, qui s’étaient emparés depuis longtemps de Surate, de Patna et de Delhi, y avaient porté leur religion.
Tamerlan était, dit-on, théiste, ainsi que Gengis-kan, et les Tartares, et la cour de la Chine. Le jésuite Catrou, dans son Histoire générale du Mogol, dit que cet illustre meurtrier, l’ennemi de la secte musulmane, « se fit assister à la mort par un iman mahométan, et qu’il mourut plein de confiance en la miséricorde du Seigneur, et de crainte pour sa justice, en confessant l’unité d’un Dieu. Malheureux prince, d’avoir cru pouvoir arriver jusqu’à Dieu sans passer par Jésus-Christ ! »
À Dieu ne plaise que nous entrions, et que nous conduisions nos lecteurs, si nous en avons, dans l’abominable chaos où l’Inde
- ↑ Tome VII, pages 35 et 36. (Note de Voltaire.) — Voici le texte : « Ce prince (Timur Bec), après avoir entamé les Indes par les ravages qu’il fit au Cabulestan, tourna ses armes contre la Perse et la Syrie, dont il fit la conquête très-rapidement, et revint, vers la fin du xive siècle, pour réduire le Cabulestan, qui l’avait cru assez occupé ailleurs pour pouvoir secouer impunément sa domination. Il châtia les rebelles, etc. »