Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome3.djvu/295

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GOTTON.

Oh ! bon tant qu’il vous plaira : je l’aime bien, papa ; mais je m’ennuie à crever, et je veux partir.

LE CHEVALIER.

Hélas ! je le voudrais aussi de tout mon cœur.

GOTTON.

Votre équipage arrive sans doute ce soir ; faisons remettre les chevaux dès qu’ils seront arrivés, et partons.

LE CHEVALIER, à part.

Ô ciel ! que je sens de toute façon le poids de ma misère ! (Haut.) Madame, l’excès de mon amour…

GOTTON.

L’excès de votre amour me fait beaucoup de plaisir ; mais je ne vois arriver ici ni cheval, ni mule, et je veux aller à Paris.

LE CHEVALIER.

Madame, mon équipage…

TRIGAUDIN.

Son équipage, madame, est en fort mauvais ordre ; ses chevaux sont estropiés, son carrosse est brisé.

GOTTON.

N’importe ! il faut que je parte.


Scène II.

LE BARON, LE CHEVALIER, GOTTON, TRIGAUDIN.
LE BARON.

Vous me voyez fort embarrassé.

TRIGAUDIN.

Et nous aussi, monsieur.

LE BARON.

Ce diable d’homme, tout fripon qu’il est, a je ne sais quoi d’un honnête homme.

TRIGAUDIN.

Oui, tous les fripons ont cet air-là.

LE BARON.

Il jure toujours qu’il est le comte de Fatenville.

TRIGAUDIN.

Il faut bien lui passer de jurer un peu dans l’état où il est.

LE BARON.

Il a vingt lettres sur lui, toutes à l’adresse du comte.