Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome3.djvu/413

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Montèze.

Le ciel est contre toi : calme un frivole zèle.
Les temps sont trop changés.

Zamore.

Que peux-tu dire, hélas !
Les temps sont-ils changés, si ton cœur ne l’est pas ?
Si ta fille est fidèle à ses vœux, à sa gloire,
Si Zamore est présent encore à sa mémoire ?
Tu détournes les yeux, tu pleures, tu gémis !

Montèze.

Zamore infortuné !

Zamore.

Ne suis-je plus ton fils ?
Nos tyrans ont flétri ton âme magnanime ;
Sur le bord de la tombe ils t’ont appris le crime.

Montèze.

Je ne suis point coupable, et tous ces conquérants,
Ainsi que tu le crois, ne sont point des tyrans.
Il en est que le ciel guida dans cet empire,
Moins pour nous conquérir qu’afin de nous instruire ;
Qui nous ont apporté de nouvelles vertus,
Des secrets immortels, et des arts inconnus,
La science de l’homme, un grand exemple à suivre ;
Enfin, l’art d’être heureux, de penser, et de vivre.

Zamore.

Que dis-tu ! Quelle horreur ta bouche ose avouer ?
Alzire est leur esclave ; et tu peux les louer !

Montèze.

Elle n’est point esclave.

Zamore.

Ah ! Montèze, ah ! Mon père,
Pardonne à mes malheurs, pardonne à ma colère !
Songe qu’elle est à moi par des nœuds éternels :
Oui, tu me l’as promise aux pieds des immortels ;
Ils ont reçu sa foi, son cœur n’est point parjure.
N’atteste point ces dieux enfants de l’imposture,
Ces fantômes affreux, que je ne connais plus,