Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome3.djvu/569

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En un mot, voyoz-los ; leurs caprlros frivnlos
Disparaîtront sans doute à vos seules paroles,

ARISTON.

Pour les revoir tous deux, j’ai tout l’ait, tout tenté ;
Lliuuiiliation ne m’a point rebuté ;
De deux refus cruels j’ai dévoré l’outrage ;
Cléon s’est détourné quand j’étais au passage ;
Knlin, de deux billets j’ai liasardé l’envoi :
Je ])leurais, je l’avoue, en écri^ant. Je voi
Que l’on a repoussé ma démarche importune,

CLITANDRE.

Que disent-ils au moins ? quelle réponse ?

ARISTON.

Aucune,

CLITANDRE.

Il faut vous l’avouer, cette obstination
Jette au fond de mon cœur un étrange soupçon :
J’entrevois contre vous quelque orage sinistre.
Tout à l’heure on disait que contre un grand ministre
Il courait dans la ville un mémoire imposteur,
Écrit très-oiïe usant dont on vous fait auteur [1].
J’ai d’abord regardé cette absurde nouvelle
Comme un fruit avorté d’une folle cervelle.
Comme un discours en l’air des oisifs de Paris ;
Mais ce discours commence à frapper mes esprits :
La chose est sérieuse, on ourdit votre perte.
Et je vois que la haine acharnée et couverte
De quelque scélérat, avec un art subtil,
D’une trame si noire aura tissu le fil,

ARISTON.

Voyons quels ennemis j’aurai donc lieu de craindre.
Je crois qu’on ne m’a vu médire, ni me plaindre.
Nuire, ni cabaler, ni des traits d’un bon mot
Blesser dans un souper l’amour-propre d’un sot.
Ma seule ambition était celle de plaire ;
La haine est pour mon cœur une chose étrangère.
Quoi ! je ne hais personne, et l’on peut me haïr !

CLITANDRE.

Quoi qu’il en soit, on cherche à vous faire périr :

  1. C’était à Voltaire, en effet, qu’on attribuait tous les libelles. Son nom les faisait mieux vendre. (G. A.)