Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/125

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et les montagnes vers le midi, et le long des côtes de la mer, terre des cananéens et du Liban, jusqu’au grand fleuve de l’Euphrate [1]… et je vous ordonnai alors tout ce que vous deviez faire ; et étant partis d’Oreb, nous passames par ce grand et effroyable désert. Voici la quarantieme année que vous êtes en chemin ; et cependant les vêtements dont vous étiez couverts ne se sont point usés de vétusté, et vos pieds n’ont point été déchaussés, [2]… écoute Israël, tu passeras aujourd

    désert de pharan, puisque l’auteur vient de dire qu’il gagna une bataille dans ce temps-là même dans le désert de Moab, à plus de cinquante lieues de Pharan. " il est faux et impossible qu’il ait été dans ce désert de Pharan proche de la mer Rouge, puisqu’il y a encore plus de cinquante lieues de la mer Rouge à ce Pharan. " il est faux qu’il y ait beaucoup d’or à Azaroth près de ce Pharan. Ce misérable pays, loin de porter de l’or, n’a jamais porté que des cailloux. " Don Calmet répete envain les explications de quelques commentateurs, assez impudents pour dire qu’au delà du Jourdain signifiait au-deça du Jourdain. Il vaut autant dire que dessus signifie dessous, que dedans signifie dehors, et que les pieds signifient la tête. " l’auteur, quel qu’il soit, fait parler Moyse sur le bord de la mer Rouge dans la quarantieme année et onze mois après la sortie d’égypte, pour donner plus de poids à son récit par le soin de marquer les dates ; mais ce soin-même le trahit, et constate tous ses mensonges. Moyse sortit d’égypte à l’age de quatre-vingts ans ; et l’écriture dit qu’il mourut à cent vingt. Il était donc déjà mort lorsque le deutéronome le fait parler ; et il le fait parler dans un endroit où il n’était pas, et où il ne pouvait être. " ces critiques hardies, imputées au savant La Croze, peuvent n’être point de lui. On n’y reconnaît point son caractere ; il a toujours parlé avec respect de la sainte écriture.

  1. nous avouons au célebre La Croze, ou à celui qui a pris son nom, qu’il y a de grandes difficultés dans ce commencement du deutéronome ; Calmet en convient. nos meilleurs critiques, dit-il, reconnaissent qu’il y a dans ces livres des additions qu’on y a mises pour expliquer quelques endroits obscurs, ou pour suppléer ce qu’on croit y manquer pour une parfaite intelligence . Ce discours du commentateur Calmet ne rend pas l’intelligence plus parfaite. Si on a, selon lui, ajouté aux livres saints, le st esprit n’a donc pas tout dicté ; et si tout n’est pas du st esprit, comment distinguera-t-on son ouvrage de celui des hommes ? Peut-on supposer que Dieu ait dicté un livre pour l’instruction du genre humain, et que ce livre ait besoin d’additions et de corrections ? On ne peut se tirer de ce labyrinthe qu’en recourant à l’église, qui peut seule dissiper tous nos doutes par ses décisions infaillibles.
  2. la bible grecque, attribuée aux septante, traduit, vos pieds n’ont point eu de calus ; mais le deutéronome, en un autre endroit, répete encore que les souliers des hébreux ne se sont point usés dans le désert pendant quarante ans. Ce miracle est aussi miracle que tous les autres. Colins suppute, que le peuple de Dieu étant parti du beau pays de l’égypte au nombre d’environ trois millions de personnes, pour aller mourir dans les déserts dans l’espace de quarante années, ce fut trois millions de vestes et de robes, et trois millions de paires de souliers à vendre, et que les juifs, qui ont toujours été fripiers, pouvaient gagner beaucoup à revendre ces effets à Babylone, à Damas ou à Tyr. Mais puisqu’il restait