Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/141

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Josué mourut agé de cent dix ans[1].


Juges.

Après la mort de Josué les enfans d’Israël consulterent le seigneur, disant : qui montera avec nous contre les cananéens, et sera chef de guerre ? Le seigneur dit : ce sera Juda qui montera ; car je lui ai donné cette terre. Juda monta donc, et Dieu lui livra le cananéen au nombre de dix mille hommes[2].

    dieux que leurs peres adorerent en Mésopotamie, ferait croire qu’Abraham, Isaac et Jacob leurs peres, avaient commencé par avoir un autre culte. Et en effet, Tharé pere d’Abraham était potier d’idoles. Et Jacob épousa deux filles idolâtres, quoiqu’il soit dit souvent que le même dieu était reconnu vers l’Euphrate et chez les enfans de Jacob. Mais ici, comment Josué peut-il laisser le choix au peuple après tant de miracles ? Il y aurait donc eu beaucoup d’hébreux qui n’auraient rien vu de ces miracles, ou qui n’y auraient ajouté aucune foi. Il se peut que ce texte signifie : vous voyez ce que Dieu a fait pour vous, et combien il serait dangereux d’en adorer un autre.

  1. Toland fait le railleur sur Mosé et sur Josué. Il dit que jamais il n’y eut de vieillards de plus mauvaise humeur. L’un fait tuer vingt-quatre mille des siens sans forme de procès pour avoir aimé des filles madianites, compatriotes de sa femme ; l’autre fait pendre trente et un rois, avec lesquels il n’avait rien à démêler. Les commentateurs recherchent avec beaucoup de soin dans quel pays se réfugierent les sujets de ces prétendus rois. Un nommé Serrarius les transporte en Germanie, où ils apporterent la langue allemande. Un nommé Hornius ne doute pas qu’ils ne se soient réfugiés en Capadoce. Grotius trouve très vraisemblable qu’ils allerent d’abord dans les îles Canaries, et delà en Amérique. Chacun donne de profondes raisons de son systême. Le révérend pere Don Calmet avoue, que l’opinion qui a le plus d’apparence et de partisans, est celle qui place les cananéens en Afrique . Il cite Procope, qui a vu dans l’ancienne ville de Tangis deux grandes colonnes de pierre blanche avec une inscription en caracteres phéniciens, que personne ne put jamais entendre, portant ces propres mots. nous sommes ceux qui nous sommes enfuis devant le voleur Josué fils de Nun. Si nous nous en tenons au texte, il est difficile que Josué ait laissé à ces peuples le temps et la facilité de s’enfuir, puisqu’il tuait tout sans miséricorde, selon que le Seigneur l’avait ordonne positivement. Mais ce qui étonne bien davantage, c’est qu’après la mort de Josué on retrouve ces mêmes Chananéens exterminés plus puissants que jamais, et tenant les Juifs dans le plus rude esclavage pendant plus de cent années, jusqu’au temps de Saûl et de David. (M.)
  2. Le lecteur peut s’étonner, après avoir vu Josué, à la tête de six cent mille combattants, mettre à feu et à sang le pays de Chanaan, de voir encore ces mêmes vainqueurs obligés de combattre contre ces mêmes vaincus. La réponse est que