Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/159

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montagne d’éphraïm, et étant venus en la maison de Michas... emporterent l’image taillée, l’ephod, les idoles, et l’image jetée en fonte. Le prêtre lévite leur dit : que faites-vous là ? Et ils répondirent : tais-toi ; ne vaut-il pas mieux pour toi d’être prêtre de toute une tribu d’Israël, que d’être prêtre chez un seul homme ? ... le lévite se rendit à leur discours. Il prit l’éphod, les idoles, et les images de sculpture, et il s’en alla avec eux.[1]... et Michas courut après eux en criant... ils dirent à Michas : que veux-tu ? Pourquoi cries-tu ? Michas répondit : vous m’enlevez mes dieux que je me suis faits, et mon prêtre ; et vous me demandez pourquoi je crie... les enfants de la tribu de Dan lui dirent : prends-garde, ne parle pas si haut, de peur qu’il ne vienne à toi des gens peu endurants, qui pourraient te faire périr toi et ta maison... ils continuerent donc leur chemin les six cents hommes et le prêtre, et ils vinrent dans la ville de Laïs chez ce peuple tranquille qui ne se défiait de rien. Ils firent périr par la bouche du glaive tous les habitants, et brûlerent la ville.[2]...

  1. il n’est donc point absolument contre la vraisemblance que six cents hommes des hordes hébraïques aient passé en pleine paix par les défilés continuels des montagnes de la Palestine, pour aller faire un coup de main sur les frontieres des sidoniens, et piller la petite ville de Laïs. Chemin fesant ils trouvent le prêtre de la famille de Michas : ce prêtre se disait devin ; et telles sont les contradictions de l’esprit humain, que presque tous les voleurs sont superstitieux. Les bandits qui ravageaient l’Italie dans les derniers siecles, ne manquerent jamais de faire dire des messes pour le succès de leurs entreprises. Les corses en dernier lieu se confessaient avant d’aller assassiner leur prochain ; et ils avaient toujours un prêtre à leur tête dans leurs brigandages. Les six cents voleurs juifs prirent donc le lévite de Michas, et ses ornements sacrés. Michas court après ses dieux, comme Laban après les siens lorsque sa fille Rachel les lui vola. Nous avons observé qu’énée, en fuyant de Troye vers le temps où le livre de Michas fut écrit, ne manqua pas d’emporter ses petits dieux avec lui. Il y a de très grandes ressemblances dans toute l’histoire ancienne. L’auteur sacré n’approuve ni Michas, ni son lévite, ni la tribu de Dan.
  2. il est étrange, dit l’abbé de Tilladet, que la horde juive, dès qu’elle prend une ville ou un village, mette tout à feu et à sang, massacre tous les hommes, toutes les femmes mariées, tous les bestiaux, et brûle tout ce qui pouvait leur servir dans un pays dont ils étaient sûrs d’être un jour les maîtres, puisque Dieu le leur avait promis par serment. Il y a non-seulement une barbarie abominable à tout égorger, mais une folie incompréhensible à se priver d’un butin dont ils avaient un besoin extrême. Nous répondrons à l’objection pressante de Mr l’abbé de Tilladet, que sans doute les juifs ne brûlaient que ce qu’ils ne pouvaient pas emporter, comme maisons et meubles qui n’étaient pas à leur usage, mais qu’ils emmenaient avec eux les filles, les vaches, les moutons et les chevres, avec quoi ils se retiraient