Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/183

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Saül consulta donc le seigneur, et lui dit : poursuivrai-je les philistins ? Et les livreras-tu entre les mains d’Israël dans ce jour ? Et Dieu ne répondit point… et Saül dit au seigneur : seigneur d’Israël ! Prononce ton jugement ; pourquoi n’as-tu pas répondu aujourd’hui à ton serviteur ? Découvres-nous si l’iniquité est dans moi, ou dans mon fils Jonathas ; et si l’iniquité est dans le peuple, donne la sainteté… Jonathas fut découvert aussi bien que Saül ; et le peuple échappa… et Saül dit : qu’on jette le sort entre moi et mon fils ; et le sort prit Jonathas. Saül dit à Jonathas : dis-moi ce que tu as fait ? Jonathas répondit : en tâtant j’ai tâté un peu de miel au bout de ma verge ; et voilà que je meurs…[1]. Et le peuple dit à Saül : quoi ! Jonathas mourra, lui qui a fait le grand salut d’Israël ! Cela n’est pas permis. Vive dieu ! Il ne tombera pas un poil de sa tête. Ainsi le peuple sauva Jonathas, afin qu’il ne mourût point…[2]. Après cela Saül se retira ; il ne poursuivit point les philistins, et les philistins se retirerent en leur lieu… et Samuel dit à Saül : le seigneur m’a envoyé pour t’oindre en roi sur le peuple d’Israël, écoute donc maintenant la voix du seigneur ; voici ce que dit le seigneur des armées. Je me souviens qu’autrefois Amalec s’opposa à Israël dans son chemin quand il s’enfuyait d’égypte ; c’est pourquoi marche contre Amalec, frappe Amalec, détruis tout ce qui est à lui, ne lui pardonne point, ne convoite rien de tout ce qui lui appartient, tue tout, depuis l’homme jusqu’à la femme, et le petit enfant qui tette ; [3] le bœuf, la brebis, le chameau, et l’âne.

  1. cette résolution de Saül, d’immoler son fils pour avoir mangé un peu de miel, a quelque chose de semblable au serment de Jéphté, qui fut forcé de sacrifier sa fille. Saül dit en propres mots à son fils : que Dieu me fasse tout le mal possible, et qu’il y ajoute encore, si tu ne meurs aujourd’hui, mon fils Jonathas. Les savants alleguent encore cet exemple, pour prouver qu’il était très commun d’immoler des hommes à Dieu. Mais les exemples de Saül et de Jephté ne concluent pas que les juifs fissent si souvent des sacrifices de sang humain.
  2. on demande pourquoi le peuple n’empêcha pas Jephté d’immoler sa fille, comme il empêcha Saül d’immoler son fils ? Nous n’en savons pas bien précisément la raison ; mais nous oserons dire que le peuple, ayant mangé ce jour-là de la chair et du sang malgré la défense, craignait apparemment que le sort ne tombât sur lui comme il étoit tombé sur Jonathas ; et qu’il devait être très en colere contre Saül qui avait été assez imprudent de défendre à ses troupes de reprendre un peu de forces un jour de combat.
  3. la foule des critiques ne parle de ce passage qu’avec horreur. Quoi ! S’écrie sur-tout le Lord Bolingbroke, faire descendre le créateur de l’univers dans un