Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/91

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et Mosé ayant étendu sa main sur la mer, le seigneur enleva la mer par un vent brûlant toute la nuit ; et la mer fut à sec, et l’eau fut divisée, et les israëlites entrerent au milieu de la mer séchée ; car l’eau était comme un mur à leur droite et à leur gauche... en ce jour les israëlites virent les corps morts des égyptiens, et l’exécution grande que la main du seigneur avait faite. Alors Mosé et les enfans d’Israël chanterent un cantique au seigneur... Marie la prophétesse, sœur d’Aaron, prit un tambour à la main ; toutes les autres femmes danserent avec elle. [1]. Mosé étant parti de la mer rouge, les israëlites allerent dans le désert de Sur, et ayant marché dans cette solitude ils ne trouverent point d’eau, et ils arriverent à Mara où l’eau était extrêmement amere. Mosé cria au seigneur, qui lui montra un bois, lequel ayant été jeté dans l’eau elle devint douce. Le quinzieme jour du second mois depuis la sortie d’égypte, le peuple vint au désert de Sin, entre Elim et Sinaï ; et ils murmurerent dans ce désert contre Mosé et Aaron ; ils dirent : plût à dieu que nous fussions morts dans l’égypte par la main du seigneur ; nous étions assis sur des marmites de viandes, et nous mangions du pain tant que nous voulions. [2]

    engloutis, comme un des plus signalés prodiges que Dieu ait faits en faveur de son peuple. On a dit, qu’un autre prodige est, qu’aucun auteur égyptien n’ait jamais parlé de ce miracle épouvantable, ni des autres plaies d’égypte ; qu’aucune nation du monde n’a jamais entendu parler ni de cet événement, ni de tout ce qui l’a précédé ; que personne ne connut jamais ni Aaron, ni Séphora, ni Joseph fils de Jacob, ni Abraham, ni Seth, ni Adam. Ils affirment que tout cela ne commença à être un peu connu que longtemps après la traduction attribuée aux septante, comme nous l’avons déjà remarqué. Les desseins de Dieu n’ont pu être accomplis que dans les temps marqués par sa providence.

  1. les critiques font des difficultés sur ce cantique : ils disent qu’il n’est guere probable qu’environ trois millions de personnes, en comptant les vieillards, les femmes et les enfants, à peine échappés d’un si grand péril, aient pu aussi-tôt chanter un cantique, et que Mosé l’ait composé dans l’instant même. Ils demandent en quelle langue était ce cantique. Ils disent qu’il ne pouvait être qu’en égyptien. C’est une objection bien frivole. Il y avait une remarque plus singuliere à faire : c’est que l’ancien livre apocryphe de la vie de Mosé dit que le pharaon échappa, et alla régner à Ninive. On a raison de traiter cette imagination de ridicule. Si vous en croyez Don Calmet, Manéthon dit que le pharaon échappa de ce péril ; mais Manéthon, dont on ne connait quelque peu de passages que par la réponse de Flavien Joseph, ne dit point du tout que l’armée du pharaon fut submergée dans la mer entr’ouverte ; il dit qu’un roi d’égypte nommé Aménophis (qui n’a jamais existé) alla au-devant d’une armée de brigands arabes établis en Palestine, qu’il n’osa en venir aux mains, et qu’il se retira en éthiopie.
  2. les incrédules ne cessent de nous reprocher insolemment que