Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome32.djvu/335

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P R É FA CE DU C M M E N T AT E D R .

qu'elle fut sur le trône, lo dessein de ne se jamais donner de mari, et de ne se soumettre jamais à un amant. Elle aimait à plaire, et elle n'était pas insensible. Robert Dudley, Sis du din- de Northumberland, lui inspira d'abord quelque inclination, et fut regardé quelque temps comme un favori déclaré, sans qu'il fût un amant heureux.

Le comte de Leicester succéda dans la faveur à Dudlc;. \ el enfin, après la mort de Leicester, Robert d'Évreux, comte d'Essex, fut dans ses bonnes grâces. Il était fils d'un comte d'Essex, créé par la reine comte-maréchal d'Irlande : cette famille était originaire de Normandie, comme le nom d'Évreux le témoigne assez. Ce n'est pas que la ville d'Évreux eût jamais appartenu à cette maison ; elle avait été érigée en comté par Richard I er , duc de Normandie, pour un de ses fils, nommé Robert, archevêque de Rouen, qui, étant archevêque, se maria solennellement avec une demoiselle nommée Herlève. De ce mariage, que l'usage approuvait alors, naquit une fille qui porta le comté d'Évreux dans la maison de Montfort. Philippe-Auguste acquit Évreux en 1200, par une transaction ; ce comté fut depuis réuni à la couronne, et cédé ensuite en pleine propriété, en 1651, par Louis XIV, à la maison de la Tour d'Auvergne de Rouillon. La maison d'Essex, en Angle- terre, descendait d'un officier subalterne, natif d'Évreux, qui suivit Guillaume le Bâtard à la conquête de l'Angleterre, et qui prit le nom de la ville où il était né. Jamais Évreux n'appartint à cette famille, comme quelques-uns l'ont cru. Le premier de cette maison qui fut comte d'Essex, fut Gautier d'Évreux 2 , père du fa- vori d'Elisabeth ; et ce favori, nommé Guillaume, laissa un fils qui fut fort malheureux, et dans qui la race s'éteignit.

Cette petite observation n'est que pour ceux qui aiment les recherches historiques, et n'a aucun rapport avec la tragédie que nous examinerons.

Le jeune Guillaume, comte d'Essex, qui fait le sujet de la pièce, s'étant un jour présenté devant la reine, lorsqu'elle allait se promener dans un jardin, il se trouva un endroit rempli de fange sur le passage ; Essex détacha sur-le-champ un manteau broché d'or qu'il portait, et l'étendit sous les pieds de la reine: elle fut touchée de cette galanterie ; celui qui la faisait était d'une figure noble et aimable, il parut à la cour avec beau- coup d'éclat. La reine, âgée de cinquante-huit ans, prit bientôt

��t. Dudley et le comte de Leicester sont la même personne. 2. On écrit Dévereu.r.

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