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ANNÉE 1731.

avec des menaces ; la reine reste au milieu de son peuple. Tout cela se passe au troisième acte ; elle a auprès d’elle cet Alcméon qu’elle aime. Elle avait, jusqu’à ce moment, étouffé sa tendresse pour lui ; mais, voyant qu’elle n’a plus de fils et que le peuple veut un maître, qu’Androgide est assez puissant pour lui ravir l’empire, et Alcméon assez vertueux pour la défendre, elle dit :

Es-tu lasse, Fortune, est-ce assez d’attentats ?
Chère ombre de mon fils, et toi, cendre sacrée
...................
   (À Alcméon.)
Oui, seigneur, de ces dieux secondez le courroux,
Vengez-moi d’Androgide, et le trône est à vous.
................…
Eh ! quels rois, sur la terre, en seraient aussi dignes ?

(Acte III, scène iii.)

À l’égard du caractère d’Androgide, l’ambition est le seul mobile qui le fait agir. Voici un échantillon de l’âme de ce monsieur ; c’est en parlant à son confident :

Moi, connaître l’amour ? Ah ! qui veut être roi
Ou n’est point fait pour l’être, on n’aime rien que soi.
...................
Dès mes plus jeunes ans, la soif de la grandeur
Fut l’unique tyran qui régna dans mon cœur.
Amphiaraüs par moi privé de la lumière
Du trône à mon courage entr’ouvrait la barrière ;
Mais la main de nos dieux la ferma sous mes pas ;
Et, dans quinze ans entiers de trouble et de combats,
Toujours près de ce trône où je devais prétendre,
J’ai lassé ma fortune à force de l’attendre[1]

(Acte III, scène i.)

J’ai extrêmement changé le second acte ; il est mieux écrit et beaucoup moins froid. J’ai, je l’ose dire, embelli le premier ; j’ai laissé le quatrième comme il était ; j’ai extrêmement travaillé le cinquième, mais je n’en suis pas content ; j’ai envie de vous l’envoyer, afin que vous m’en disiez votre avis avec toute la rigueur possible. Hélas ! je parlais de tout cela à ce pauvre M. de Maisons, au commencement de sa petite vérole : il approuvait ce nouveau plan autant qu’il avait blâmé le premier acte de l’autre. Tenez-

  1. M. Clogenson, qui le premier a publié les vers rapportés dans cette lettre, annonce n’avoir transcrit que les variantes qui étaient inédites. J’ai donné de la pièce d’Ériphyle une version nouvelle, mais je me suis bien gardé d’épuiser les variantes. (B.)