Á l’égard de mon cothurne, il ne passera qu’après celui de La Grange[1] : ainsi Ériphyle ne paraîtra probablement qu’en février. Tant de délais sont bien favorables. Êriphyle n’en vaudra que mieux ; mais, s’ils font du bien à la pièce, ils font bien du mal à l’auteur, qu’ils privent trop longtemps de la douceur de vivre avec vous. Je suis toujours malade, toujours accablé des souffrances qui me persécutaient à Rouen ; mais je vous avais pour ma consolation, et vous me manquez aujourd’hui.
Ces entretiens charmants, ce commerce si doux,
Ce plaisir de l’esprit, plaisir vif et tranquille,
Est à mon corps usé le seul remède utile.
Ah ! que j’aurais souffert sans vous !
Il y a quelques jours que je suis à Paris, mon cher monsieur. Je fis partir hier par le coche de Rouen un paquet contenant quatre exemplaires de l’Histoire de Charles XII : un pour vous, un pour M. de Cideville, un pour monsieur le premier président, et un pour son secrétaire. Voilà les premiers volumes qui voient le jour. Il est bien juste que vous ayez les premiers, et jamais assurément on n’en a présenté de meilleur cœur. On m’a parlé d’une lettre charmante que vous avez écrite à Mlle de Launay[3]. Vous en êtes bien capable ; mais M. Thieriot prétend que vous allez faire quelque chose de bien mieux, que vous viendrez bientôt à Paris. Venez-y donc, aimable philosophe, et retournons à Rouen ensemble.
Vous verrez Êriphyle bien changée. M. de Cideville m’a déjà mandé que vous aviez approuvé les premiers changements que j’y avais faits : cela m’a bien encouragé. Vous m’avez rendu plus attentif et plus sévère, à mesure que vous avez goûté mes corrections. Malheur à tout ouvrage
… Quod non multa litura coercuit !
J’ai bien envie de vous montrer le tout comme il est à présent.
J’ai aussi à vous consulter sur la manière dont je dois finir