Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/473

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compte de sa bonne volonté, et n oubliez pas l’empressement que j’ai de vous faire ma cour.


441. — À M. LE MARQUIS D’USSÉ[1].

Monsieur, la fille d’un de vos meilleurs amis, beaucoup plus aimable encore que son père, a été également touchée de votre souvenir et de la manière dont vous l’exprimez. Elle a cru d’abord que l’épître était de monsieur votre fils, au feu brillant qui règne dans vos vers ; mais, sachant que votre imagination a toujours la grâce et la vigueur de la jeunesse, elle a bien vu que l’ouvrage est de vous. Quoique vous m’ayez adressé la lettre, monsieur, je sens que ce n’était qu’un fidéicommis pour Mme du Châtelet.

Je ne suis rien qu’un prête-nom ;
Votre épître a paru si belle,
Et si neuve, et d’un si bon ton,
Que sans doute elle était pour elle.

Je ne sais pas comment vous pouvez vous défier de votre raison, quand vous la faites parler d’une manière si charmante.

Si d’Horace le doux langage,
Et la prose de Cicéron,
La vérité, le badinage ;
Si tout cela n’est pas raison,
Apprenez-nous quel autre nom
Il faut qu’on donne à votre ouvrage.
Cette raison, je l’avouerai,
N’est pas le don le plus sacré
Que l’homme reçut en partage ;
Il en est un autre, à mon gré,
Au-dessus de l’esprit du sage.
Un don plus beau, plus précieux,
Par qui la raison embellie
Plaît en tout temps comme en tous lieux.
Quel est ce don ? C’est le génie.



On a vu ce génie heureux
Vous inspirer dès votre enfance.
En vain de l’âge qui s’avance
La main vient blanchir vos cheveux ;

  1. Vovez la note de la lettre 25.