Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/49

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tout le monde croit que c’est ma faute ; j’en reçois tous les jours des reproches. Je vous conjure enfin de presser M. Thieriot ou M, Lamare d’exiger tous ces changements.

Je sais qu’on fait bien d’autres critiques ; mais pour satisfaire les censeurs il faudrait refondre tout l’ouvrage, et il serait encore bien plus critiqué. C’est au temps seul à établir la réputation des pièces, et à faire tomber les critiques.

M. et Mme du Chàtelet ont approuvé l’Épître dédicatoire. À regard d’un Discours[1] apologétique que j’adressais à M, Thieriot, je ne suis pas encore bien décidé si j’en ferai usage ou non. Je ne répondrai jamais aux satires qu’on fera sur mes ouvrages ; il est d’un homme sage de les mépriser ; mais les calomnies personnelles, tant de fois imprimées et renouvelées, connues en France et chez les étrangers, exigent qu’on prenne une fois la peine de les confondre. L’honneur est d’une autre espèce que la réputation d’auteur ; l’amour-propre d’un écrivain doit se taire, mais la probité d’un homme accusé doit parler, afin qu’on ne dise pas :

· · · · · · · · · · · · · · · Pudet hæc opprobria nobis
Et dici potuisse, et non potuisse repelli.

(Ovid., Mêtam., liv. I, v. 758.)

Reste à savoir si je dois parler moi-même, ou m’en remettre à quelque autre : c’est sur quoi j’attends votre décision.

Pardon de ma longue lettre et de tout ce qu’elle contient. Mme du Châtelet, qui pense comme moi, mais qui me trouve un bavard, vous demande pardon pour mes importunités. Elle obtiendra ma grâce de vous. Elle fait mille compliments aux deux aimables frères, pour qui j’aurai toujours la plus tendre amitié et la plus respectueuse reconnaissance.


568. — Á M. THIERIOT.
À Cirey, le 26 février.

Je ne me porte guère bien encore. Raisonnons pourtant, mon cher ami. Pas un mot de Samson aujourd’hui, s’il vous plaît ; tout sera pour Alzire : je viens de la recevoir ; c’était de vous que je l’attendais ; je suis au désespoir qu’elle ait été en d’autres mains qu’entre les vôtres et celles de M. d’Argental. Ce sont des profanes qui se sont emparés de mes vases sacrés ; et vous, mon grand prêtre, vous ne les avez pas eus dans votre sacristie !

  1. Voyez la note 2, page 22.