Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome35.djvu/363

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je chargeais mon valet de chambre de la déclaration dont Collens est l’unique cause. Il pourrait se servir de cette lettre. Je gagnerais le procès, au moins je le crois, mais il serait encore désagréable de le gagner.

Il faut donc qu’il y ait entre lui et vous un compromis bien net, avant que je fasse rien ici. Considérez, je vous prie, qu’il paraît que les tableaux lui appartiennent, et que, si je payais encore le rachat de ces tableaux, il pourrait les revendiquer ; il pourrait dire : J’ai au moins moitié dans tout, et je ne dois rien payer du rachat ; au lieu que, si vous l’engagez à convenir par écrit que vous avez prêté, avancé dix-huit cents florins ou environ pour le total des tableaux, que ces dix-huit cents florins doivent vous être remboursés préalablement à tout, il fait une chose très-juste, et il finit toute discussion. Mais je n’irai pas, moi, donner encore ici deux mille livres au moins, pour hasarder de les perdre encore : je recule tant que je peux ; mais je ne peux pas différer toujours. Il faut finir. Le pis-aller serait d’abandonner le tout aux commis, pour les trois cents florins de taxation, et que vous gardiez l’argent que vous aurez touché des autres tableaux vendus à Paris. Gardez toujours à tout événement l’argent qui proviendra de la vente de ce qu’il a emporté, et que vous pourrez toucher, car il peut très-bien arriver que ceci tourne fort mal. Je n’avancerai pas un sou à Bruxelles sans avoir un billet de Collens qui me réponde de ce que j’ai déjà avancé. Cela me paraît si simple que je n’y vois aucun prétexte de refus. Voilà bien du verbiage. Je me tais et je vous embrasse.


1220. — À FRÉDÉRIC, PRINCE ROYAL DE PRUSSE.
(Bruxelles), 28 décembre.

Monseigneur, que souhaiter à Votre Altesse royale, cette année ? Elle a tout ce qu’un prince doit avoir, et plus qu’un particulier qui aurait sa fortune à faire par ses talents. Non, monseigneur, je ne fais point de souhaits pour vous ; j’en fais, si vous le permettez, pour moi ; et ces souhaits, vous en savez le but, ut videam salutare meum[1]. Je fais encore un souhait pour le public, c’est qu’il voie la réfutation que mon prince a faite du corrupteur des princes. Je reçus, il y a quelques jours, à Bruxelles, les douze premiers chapitres ; j’avais déjà dévoré les

  1. Évangile de Luc, chapitre ii, v. 30.