Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome35.djvu/480

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m’écrivez qu’en homme, et méprisez avec moi les noms, les titres, et tout l’éclat extérieur » ?

Eh bien ! qu’en dites-vous ? Votre cœur n’est-il pas ému ? N’est-on pas heureux d’être né dans un siècle qui a produit un homme si singulier ? Avec tout cela, je reste à Bruxelles, et le meilleur roi de la terre, son mérite et ses faveurs, ne m’éloigneront pas un moment d’Émilie. Les rois (même celui-là) ne doivent marcher jamais qu’après les amis ; vous sentez bien que cela va sans dire.

Ne pouvez-vous pas me rendre un très-grand service, en en rendant un petit à M. le marquis du Châtelet ? Il s’agit seulement d’épargner le voyage d’un maître des comptes ou d’un auditeur.

M. du Châtelet a, comme vous savez, en Normandie, de petites terres relevant du roi, nommées Saint-Rémi, Heurlemont et Feuilloi ; il en a rendu les aveux et dénombrements à la chambre des comptes de Rouen ; il s’agit actuellement d’obtenir la mainlevée de ces dénombrements, et, pour y parvenir, il faut faire, dit-on, information sur les lieux. C’est apparemment le droit de la chambre des comptes. Elle députe un ou deux commissaires, à ce qu’on dit, pour aller faire semblant de voir si l’on a accusé juste, et se faire payer grassement de leur voyage inutile. Or on prétend qu’il n’est ni malaisé ni hors d’usage d’obtenir un arrêt de dispense de la chambre des comptes, et d’obtenir la mainlevée sans avoir à payer les frais de cette surérogatoire information. Le père de M. du Châtelet obtint pareil arrêt pour les mêmes terres. Voyez, pouvez-vous parler, faire parler, faire écrire à quelqu’un de la chambre des comptes, et nous dire ce qu’il faut faire pour obtenir cet arrêt de dispense ?

Adieu, mon aimable ami ; vous êtes fait pour plaire et pour rendre service. V.


1305. — À M. BERGER.
Bruxelles, le 29 juin.

Je ne souhaite point du tout, monsieur, que M. Rameau travaille vite ; je désire, au contraire, qu’il prenne tout le temps nécessaire pour faire un ouvrage qui mette le comble à sa réputation. Je ne doute pas qu’il n’ait montré mon poëme[1] dans la

  1. Pandore.